Communiqué de la Convention Vie et Nature du 23 Juillet 2015
Tout individu, tout groupe social en détresse mérite une bienveillante attention.
Les éleveurs manifestent avec une virulence et des modes d’actions que l’Etat ne tolérerait d’aucun autre groupe socio-professionnel.
Nous entendons leurs problèmes qui valent ceux des salariés du secteur public dont le point d’indice est gelé depuis six ans, celui des personnels hospitaliers soumis à une pression éprouvante, celui des étudiants dont les diplômes n’ouvrent aucune porte, celui des gens sans emplois, sans perspective, celui des personnes âgées au montant de retraite dérisoire.
Les militants qui protestent pacifiquement contre les corridas ou pour la défense des sites sans entraver la circulation, sans souiller les rues, sans intercepter des marchandises ne bénéficient pas de la même tolérance.
Or, l’article premier de la déclaration des droits de l’homme du 26 août 1789, intégré en préambule de la constitution proclame : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit ».
Néanmoins, abstraction faite de la pusillanimité des pouvoirs publics et des différences d’application des lois pénales selon que vous serez agriculteurs ou simples citoyens, salariés, étudiants, demandeurs d’emplois, il convient d’entendre la détresse de ceux qui affirment ne plus avoir les moyens de vivre de leur travail.
La cause de leur difficultés ne tient qu’au mode de production mis en place par le principal syndicat agricole et par les partis politiques conservateurs et libéraux, à savoir, la loi du marché, la libre concurrence. Le libéralisme économique implique, ici comme en tout autre secteur, une course à la diminution des coûts de production, à la rentabilité, donc au gigantisme.
Au terme de cette politique, les viandes et le lait seront fournis par d’immenses usines concentrationnaires.
L’agriculture de demain, dans un régime d’adoration du Marché, se fera sans paysans mais avec quelques unités gérées par des groupements financiers, avec des fermes de mille vaches, mille veaux, des milliers de porcs et toujours davantage.
En CREUSE, le syndicat agricole a récemment mobilisé ses adhérents en faveur d’une telle « ferme », dite des mille veaux, sans expliquer que ce mode d’élevage exclura très rapidement l’élevage à l’ancienne.
La France comptait, il y a une vingtaine d’années, quatre cent mille producteurs de lait. Aujourd’hui, ils sont quatre vingt mille.
La politique agricole prônée par les productivistes et les partis politiques conservateurs et libéraux tue le paysan et nie les exigences biologiques et éthologiques des animaux, transformés en pures marchandises.
Car, nos gouvernants, terrorisés par les colères agricoles, nos médias, soucieux de suivre sans trop d’analyse le mouvement, se gardent bien d’évoquer le sort des animaux.
On nous parle d’abattoirs, de cours des viandes, en oubliant que la vache et le porc sont des êtres sensibles.
Qu’il nous soit permis de le rappeler.
La société est ce qu'elle est.
Depuis des siècles, l'homme s'est fait éleveur.
Naguère, de petites unités, de modestes fermes, détenaient quelques animaux, souvent menés au pré. Les prairies étanent entourées de haies, possédaient des mares et le fermier connaissait ses bêtes, souvent nommées individuellement.
Non, l'homme de ce temps bucolique n'aimait pas davantage la nature que l'exploitant agricole d'aujourd'hui. Il ne possédait, ni mécaniquement, ni chimiquement, les moyens de la nuisance que lui confèrent les techniques agrochimiques et les puissantes machines.
Les haies sont arrachées, els mares comblées, les arbres abattus pour favoriser cette mécnisation et les animaux, élevés en plus grand nombre n'ont plus de nom.
Mais, hier comme aujourd'hui, l'exploitant agricole considère la nature comme une mine à exploiter et l'animal comme une marchandise ne valant que ce qu'elle vaut au Marché.
Ce n'est pas pour rien qu'une opposition éthique fondamentale existe entre l'exploitant agricole et l'écologiste.
Nos approches du vivant sont différentes.
Pour nous la nature vaut ainsi que l'animal, être sensible et non marchandise.
Le problème, pour les agriculteurs, réside dans les fautes de leur lobby et des politiques dites libérales:
Soucieux de rentabilité, de concurrence, de productivisme, le système condamne à la disparition nombre d'exploitations au profit de grandes unités massives permettant d'écraser les coûts.
La FNSEA porte ainsi une lourde responsabilité dans la crise de l'élevage en soutenant cette politique intensive au détriment de considérations sociales.
En cette affaire, comme en toute autre, il faut changer de politique pour réconcilier l'humain avec e vivant et édifier une société de partage et non de compétition féroce.
Gérard CHAROLLOIS