par Jean-Paul RICHIER
Avec le décret n° 2013-1301 du 27 décembre 2013 paru au Journal Officiel du 31 décembre, les éleveurs industriels de porcs peuvent dire merci au gouvernement.
Par un texte réglementaire parfaitement incompréhensible au commun des mortels, où les porcs se mélangent à la transformation de polymères, les élevages de 450 à 2.000 porcs (enfin, "animaux-équivalents", comme dit le texte) n'ont dorénavant qu'à s'enregistrer (au-delà, les normes européennes restent en vigueur). Jusqu’à présent, toute ouverture ou extension au-dessus de 450 porcs nécessitait une autorisation conditionnée à une enquête environnementale préalable.
Ce décret, signé par Jean-Marc Ayrault et par Philippe Martin, le ministre de l'écologie et du développement durable (on ne rit pas), va donc favoriser la concentration des élevages, au triple détriment de l'environnement (avec les rejets nitratés), du bien-être animal, et des emplois.
L'association Eau & Rivières de Bretagne a été la première à attirer l'attention sur cette décision. On pourra consulter la dépêche de l'AFP par exemple dans Libération, ainsi que l'article bien fait de France Info.
Dans ce même Journal Officiel, on trouve, deux décrets plus loin, le décret n° 2013-1303 du 27 décembre 2013. Ce décret précise les consultations publiques censées intervenir dans les décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement, conformément à l'article 7 de la Charte sur l'environnement, l'article 3 de la loi n° 2012-1460, et l'article L120-1 du code de l'environnement.
C'est ainsi qu'une consultation "citoyenne" avait eu lieu sur ce décret (plus particulièrement les élevages de porcs) du 25/10/2013 au 15/11/2013. Aurions-nous notre mot à dire ?
On sait que l'essentiel de la production porcine française se concentre en Bretagne (plus particulièrement dans le Finistère et les Côtes d'Armor). Les consultations citoyennes les plus efficaces seraient-elles donc celles qui consistent à tout casser sur les routes ? En ce cas, l'avenir de la France est décidément inquiétant.
En fait, derrière les Benêts Bonnets Rouges, la FNSEA et le MEDEF étaient particulièrement attentifs.
En témoigne cet article de fin novembre sur un éleveur de porcs du Finistère « président de l'Association pour le maintien de l'élevage en Bretagne et membre de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles (FDSEA) du Finistère, en pointe dans le combat des "Bonnets rouges" ». Il est « à la tête d'une exploitation de 20 000 porcs que font tourner une demi-douzaine de salariés » à un rythme où « tout est compté, minuté » (ces chiffres éberluants demanderaient à être précisés, mais les cochons ne sont sans doute pas chouchoutés).
« Il fustige l'Union européenne, dont certaines décisions pourront engendrer la suppression de près de 50 000 truies à l'échelle de la Bretagne. "Cela correspond à la production d'un million de porcs charcutiers, détaille-t-il, de quoi faire fonctionner un abattoir. […] Tout ça "à cause des normes sur le bien-être animal imposées par Bruxelles et appliquées de façon plus draconienne en France où on lave plus blanc que blanc", soupire-t-il. »
Bref, un garçon sympathique.
Bon, parmi les manifestants bretons, il y avait évidemment des hommes qui travaillent dur et gagnent peu, ou qui n'ont plus de travail, ou qui craignent de le perdre.
Et quand on est aux commandes politiques, la question de la filière porcine industrielle n'est sûrement pas simple à résoudre dans notre monde globalisé.
Mais on attend des hommes politiques qu'ils prennent de la hauteur, pas qu'ils continuent à aller dans le mur en pataugeant dans le lisier. A fortiori quand ils se disent socialistes.
JPR.
Bien à vous.
Lorca