Bonjour chers amis,
Je voudrais vous parler de 2 choses, d’abord de l’environnement et ensuite de la chasse.
L’environnement est un concept que je n’aime pas du point de vue éthique, philosophique et moral.
Cela sous-entend qu’il y a une « espèce élue » qui est au centre de tout, l’Homme.
L’Homme est là, et autour de lui il y a un décor, il y a une nature qui lui sert de ressource.
Si le décor est beau, si les ressources sont là, l’homme protège la nature, mais en revanche, si une espèce ne nous est pas directement utile, alors peu importe, on peut la détruire. Même les écologistes – je le dis sans méchanceté – ceux que j’appelle les écologistes « opportunistes » – essaient de nous dire : « Mais il faut protéger les plantes tropicales, parce que vous savez, il y a une petite pervenche de Madagascar, qui nous a offert des molécules contre le cancer. Si on avait détruit la petite pervenche de Madagascar, on n’aurait pas eu ces molécules ». On nous dit aussi : « L’éléphant d’Afrique doit payer un prix à sa protection. Ce prix, c’est le tourisme. Si l’éléphant d’Afrique ne payait pas ce prix, ne payait pas à l’homme ce « droit d’entrée sur la planète », hé bien, on pourrait détruire l’éléphant d’Afrique »… Je ne suis pas d’accord avec cette conception.
C’est une conception anthropocentrique et non une conception biocentrique qui met le vivant au centre de tout. Pour nous une espèce vaut par elle-même, un individu quel qu’il soit vaut par lui-même, et peu importe son utilité pour le marché, pour le profit, pour les affaires de quelques « rapaces »… Et excusez-moi pour les rapaces, je les insulte en les comparant à ceux qui tirent les ficelles de notre société et qui sont les maîtres du système ! Je dis que la nature vaut par elle-même (applaudissements)... Donc nous sommes en effet différents de ceux qui , à quelques centaines de mètres d’ici, dissertent aujourd’hui pour savoir si le taux de TVA sur les immeubles que l’on rénove doit passer de 5 à 10% ou s’il faut mettre un peu plus d’énergies nouvelles qui vont se substituer – ou « ajouter » plutôt que substituer – des nuisances à celles déjà existantes… Cette conception de l’environnement n’est pas la nôtre.
Notre conception de l’environnement c’est la réconciliation de l’homme avec sa planète, la réconciliation de l’homme avec le vivant, et donc la réconciliation de l’homme avec lui-même ! Parce que tout se tient : ce que l’homme fait aux animaux, ce qu’il fait à la nature, il le fait à ses semblables et le système dans lequel nous vivons, le système économique actuel est un système fondé sur la violence, sur la thanatophilie, c’est-à-dire sur le goût de la mort, alors que nous, nous voulons un système fondé sur la vie !
Mais, vous êtes venus aujourd’hui pour entendre parler de la chasse… Alors parlons-en !
Il y a 30 ans que je suis entré dans ce combat contre la chasse, aux côtés du professeur Théodore MONOD que j’ai bien connu et qui est un homme qui mérite toute notre estime et dont la mémoire doit rester présente auprès de chaque militant de la défense du vivant. Nous avions créé une association d’opposition « éthique » à la chasse il y a déjà 30 ans… Et pourquoi l’avons-nous fait ?
Nous l’avons fait parce que la chasse pose trois types de défis à l’homme. Un défi écologique, un défi éthique et en France – en France spécifiquement – un défi politique.
Le défi écologique est le suivant : la chasse participe à la disparition des espèces. Un jour un biologiste a recensé les espèces disparues parmi les mammifères et les oiseaux. Depuis le XVIIème siècle, il a décompté 664 espèces de mammifères et d’oiseaux disparus de la surface de la Terre du fait de l’Homme. Hé bien, ces 664 espèces disparues – je ne parle pas des invertébrés, des amphibiens ou des reptiles, mais seulement des mammifères et des oiseaux ! – ont toutes, « toutes », été anéanties par la chasse ! Et non par l’aménagement du territoire ou les pesticides qui se surajoutent bien sûr à cette agression. C’est la chasse qui a fait disparaître l’ours pyrénéen, qui a éliminé le loup et qui n’accepte pas son retour ; c’est la chasse qui pose des problèmes parce que les chasseurs veulent tuer les tétras ("Coq de Bruyère") en voie de disparition dans les Pyrénées alors qu’il n’y en a presque plus. Les chasseurs veulent – et le ministère est en train de leur prêter main forte – capturer 300.000 pinsons et ortolans dans les Landes ! La « régulation » du pinson et de l’ortolan, voilà qui du point de vue écologique est en effet quelque chose de génial, n’est-ce pas ? (sifflets) Et que viennent-ils nous dire ? Qu’ils sont là pour protéger les bonnes gens des renards qui viendraient manger les grands-mères même dans les banlieues de Paris, ou les sangliers qui font d’énormes dégâts dans les cultures… (applaudissements). Mais s’il est vrai que deux ou trois espèces animales – je dis bien deux ou trois seulement – sangliers et chevreuils, ne se portent pas mal et même dans certains endroits prolifèrent, cela n’est pas « malgré » la chasse, mais « à cause » de la chasse ! La chasse n’est pas la solution, la chasse est le problème ! (applaudissements). Parce que ce sont les chasseurs qui relâchent massivement des sangliers croisées avec des porcs domestiques pour en accroître la prolificité ! Ce sont eux qui agrainent ces sangliers et qui ont fait disparaître tous les prédateurs qui pourraient réguler naturellement la faune sauvage ! Ils ne veulent pas de lynx, ils ne veulent pas de loups, ils ne veulent pas d’ours. Ce sont les chasseurs qui sont derrière tous les lobbies de l’élevage qui veulent détruire ces espèces parce qu’elles les concurrenceraient comme les concurrencent les fouines, les martres, les putois, les renards qu’ils continuent à persécuter.
Donc la chasse pose un problème écologique majeur. C’est elle qui créé les déséquilibres, c’est elle qui créé les proliférations de certaines espèces et les disparitions de toutes les autres (applaudissements).
Deuxième problème posé par la chasse, un problème éthique.
Pourquoi un problème éthique ? Hé bien parce que l’animal n’est pas une chose, ce n’est pas un objet… On sait aujourd’hui que l’animal est un être doté d’une sensibilité capable comme nous-mêmes d’éprouver la souffrance et le principe du plaisir-déplaisir. Dès lors, le fait de tuer pose déjà un problème moral. Et le fait de tuer pour se distraire pose un double problème moral (applaudissements). A la chasse non seulement l’homme tue pour le profit, mais il tue tout simplement pour s’amuser, ce, qui évidemment met ce loisir en marge de tout le reste… Je rapproche le fait chasse du fait corrida (applaudissements). Pourquoi ? Parce qu’à la chasse comme à la corrida, l’homme rabaisse l’animal au rang d’objet de plaisir que l’on peut torturer ! Or c’est quelque chose de très malsain d’enseigner la violence. Cette violence que l’homme fait subir à l’animal, il le fait à l’occasion à ses semblables. Parce que l’on s’entraîne sur les animaux et on fait pareil sur les hommes. Regardez dans l’Histoire, l’Histoire des guerres, l’Histoire des guerres civiles, et vous constaterez que les combattants utilisent souvent contre leurs ennemis humains les mêmes procédés qu’ils ont utilisés sur les animaux. Ils se sont « fait la main » avec le fusil ou avec le couteau sur la bête avant de se la faire sur l’homme ! La chasse est une école de violence, c’est une école qui apprend la banalisation de l’acte de mort, alors que l’acte de mort est un acte grave. Et aussi longtemps que l’homme traitera l’animal comme une chose, il traitera ses semblables comme des bêtes quand l’occasion s’en présentera ! (applaudissements). Voilà ce que je voulais dire du point de vue éthique.
Troisième aspect ; après l’aspect écologique, après l’aspect éthique et moral, il y a un aspect politique qui est spécifique à la France. Notre pays pâtit malheureusement d’une « dictature des chasseurs ». Il faut le dire ! Depuis trente ans que nous les combattons, juriste que j’étais, j’ai découvert à l’époque avec stupéfaction, comment un groupe de pression pouvait confisquer l’état, s’emparer de l’état et transformer nos politiciens en pantins irresponsables ! (applaudissements). Et ça fait trente ans et même plus que cela dure. Alors je vais vous expliquer pourquoi.
La chasse est devenue minoritaire dans nos sociétés. Quand on fait des enquêtes d’opinion, on se rend compte que 70 à 80% des français souhaiteraient l’abolition de la chasse à courre, que 70 ou 80% des français souhaiteraient que l’on ne chasse pas le dimanche pour pouvoir se promener, que 70 ou 80% des français souhaiteraient que les directives européennes de protection de la nature soient mieux transposées en droit français… Et tout cela n’aboutit pas… Pourquoi ? Hé bien, parce que la chasse s’organise en une structure corporatiste très dure, très légalisée, sur la base d’une ordonnance du maréchal PETAIN du 28 juin 1941 qui créa les « Sociétés départementales de chasseurs » promues à la libération par un arrêté du 15 novembre 1945 en « Fédérations départementales des chasseurs ». Dans chaque département vous avez une seule structure, vous n’avez pas les chasseurs modérés et les chasseurs irresponsables, vous n’avez pas les chasseurs de gauche et les chasseurs de droite, ceux qui croient au ciel et ceux qui n’y croient plus, non, vous avez une seule et unique structure… Avouez que protecteurs de la nature et des animaux que vous êtes, vous seriez gagnants d’en avoir autant, n’est-ce pas ? On nous dit souvent « être victimes de l’émiettement associatif ». Hein ? Combien cela fait notre faiblesse !... Hé bien eux ça fait leur force ! Ils sont structurés dans une seule fédération départementale ; une seule ! Ils sont obligés d’y cotiser tous les ans. Et au niveau national, ces fédérations sont structurées en une Fédération Nationale des Chasseurs. Vous avez donc une structure pyramidale qui permet à un groupe de pression minoritaire, très minoritaire, de tenir l’Etat. Parce que quand un président de fédération va trouver son parlementaire ou le ministre, ils ont des moyens, ils ont des lobbyistes, qui parcourent les couloirs de l’Assemblée Nationale ou du Sénat, rémunérés à cette fin, toute la journée et avec quelques privilèges ... J’ai même entendu dire que dans l’ancienne majorité un de ces lobbyistes avait un badge qui lui permettait d’aller là où seuls les élus peuvent aller ! Voyez-vous, il avait les mêmes privilèges qu’un élu, ce monsieur qui est bien connu comme lobbyiste du monde de la chasse… Bon, ces gens-là ont des moyens financiers et une structure qui leur permettent de confisquer la démocratie et d’empêcher la majorité des français qui ont d’autres aspirations d’être entendus…
Cette situation, ne peut pas durer, elle doit être dénoncée. Il faut dénoncer ce totalitarisme du monde de la chasse, qui paralyse les successifs ministres de l’environnement… Je me souviens que M. ROSANO qui était le directeur de cabinet d’une ministre d’autrefois, qui s’appelait Huguette BOUCHARDEAU, m’avait dit : « Vous savez, si un conflit éclatait entre un président de fédération et un ministre, c’est le ministre qui sauterait ! ». C’est vous dire ce que ça représente ! Voilà… Donc cette situation ne peut pas durer.
Combien sont-ils les chasseurs ?... Ce chiffre vous ne le trouverez pas. Vous ne saurez pas combien ils sont actuellement parce qu’ils le cachent. Leur nombre diminue d’année en année. Quand j’ai commencé ce combat, ils étaient 2 millions 400.000 en France. Aujourd’hui il y a à peu près 1 million 200.000 permis de chasser validés. Mais ils ne sont pas 1 million 200.000, parce qu’un certain nombre d’entre eux a plusieurs permis, un permis national et un permis départemental… En fait, je pense qu’ils sont un peu moins d’1 million, d’où le fait qu’ils cachent désormais même le nombre de permis validés ! C’est très difficile même pour la presse de faire le travail d’investigation sur ce point-là. Le nombre des chasseurs diminue et je suis convaincu que d’ici quelques années ce lobby s’écroulera !. La chasse est une Bastille assiégée qui n’a qu’un seul mot d’ordre : « Ne rien concéder ! ». Ne rien concéder du point de vue écologique, ne rien concéder du point de vue moral : soutenir tous les modes de chasse y compris les plus cruels comme le déterrage de blaireaux, y compris les plus nocives comme les lègues dans le sud-ouest. Ils soutiennent tout parce qu’ils ont peur que de concessions en concessions, nous les amenions à ce qu’il faut, c’est la « concession perpétuelle ». Voilà ce que nous leur promettons ! (applaudissements).
La CONVENTION VIE ET NATURE ne souhaite pas une réforme impossible de la chasse française qui n’est pas réformable. Parce que leurs dirigeants ne veulent pas réformer. Ce qu’ils gèrent, ce n’est pas la nature ni la faune, ils gèrent en fait le nombre de leurs cotisants, dont ils tirent à la fois finances et influence politique. Donc ce qui compte pour eux, c’est d’avoir des adeptes et ils feront tout pour cela. Nous, ce que nous disons clairement, c’est : « Réformer la chasse c’est impossible, il faut donc l’abolir ! » (Applaudissements). Mes amis, vous êtes venus aujourd’hui à Paris pour dire cela très haut, très fort et très clair.
Je voudrais maintenant vous lancer un appel associatif : « UNISSEZ-VOUS ! ». Que toutes les associations se tendent la main, que nous soyons unis tous dans le combat pour que recule la cruauté et que reculent en France ces lobbies malfaisants qui sont ceux de l’élevage concentrationnaire, de la tauromachie, de la chasse, et de tout ce qui nuit à la vie, de tout ce qui abaisse les êtres, les animaux, les hommes, et la nature ; et puisque c’est le mot d’ordre de la CVN : «La réconciliation de l’arbre, l’animal et l’homme » ! Merci à vous d’être là !