Monsieur,
C’est avec affliction que j’ai découvert, à l’écoute de votre émission « Réplique », de ce jour, sur France-Culture, l’ambiguïté de votre position face à la torture tauromachique.
Désormais, je ne pourrai plus vous écouter avec cet intérêt et sympathie que suscitaient vos réflexions et analyses, parfois en échos avec les miennes, parfois en divergences mais toujours utiles.
Désormais, un fossé plein de sang et d’horreurs nous sépare.
Vous illustrez ces trahisons des clercs qui dans le passé, amenèrent trop d’intellectuels, de philosophes, d’écrivains, de scientifiques à accepter, voire à soutenir avec ardeur, HITLER, STALINE, MAO et consorts.
Bien sûr, la corrida ne torture jamais qu’un taureau, diront ceux qui refusent de réfléchir, ne serait-ce qu’un instant, sur la notion d’animal.
L’anatomie, la physiologie comparées des siècles passés auraient déjà dû prévenir les hommes et leur révéler l’unité profonde du vivant.
La génétique, la paléontologie contemporaines, la science de l’évolution confirment cette unité.
Un animal, doté d’un cortex, d’une moelle épinière, de circuits nerveux très voisins des nôtres éprouve la douleur et le stress.
Or, une corrida n’est qu’un spectacle répugnant de torture d’un herbivore préalablement maltraité, avant son entrée dans l’arène, pour en affaiblir les capacités physiques.
Il est grotesque d’entendre un philosophe invoquer les grands auteurs grecs et pourquoi pas parler latin pour masquer les faits et l’abjection d’un crime moral.
Un art, un sport, un rite, un combat la corrida ?
Non, ce n’est que la torture et la mise à mort publique d’un animal supplicié.
Votre invité, professeur de philosophie, discourut sur les « vertus aristocratiques » véhiculées par ce spectacle.
Certes, ces vertus existent, sans d’ailleurs se manifester dans la corrida, et nous les connaissons.
Ce sont les vertus de la SS aux poings de fer, celles du courage de tuer et de torturer, car, indéniablement, il faut du courage pour se muer en tortionnaire.
Mais, ces vertus-là ne font pas l’homme.
Elles l’abrutissent, l’anesthésient, le privent de l’essentiel : sa capacité d’empathie.
Je dis qu’elles sont absentes de la corrida, spectacle truqué car le torero n’encourt guère plus de risques d’être blessés qu’un cycliste traversant PARIS.
Les accidents surviennent très rarement et les tueurs de taureaux sont des héros de foires.
Leur courage ne tient qu’à l’abaissement du sens moral leur permettant de faire le mal.
Aussi, est-ce avec regret que j’ai observé votre absence de sursaut d’indignation face à une activité qui en torturant l’animal avilit l’homme.
Je vous avais pourtant entendu, lors d’une précédente émission, exprimer votre sympathie pour les vaches.
Alors, refusant de désespérer, je vous adresse l’assurance de mes salutations.
Gérard CHAROLLOIS