Parmi tous les dogmes ressassés par les médias, les commentateurs, les politiciens, celui de la croissance démographique est le mieux célébré.
Les détenteurs de la parole publique se félicitent du taux de natalité Français, supérieur à celui de l’Allemagne et de la plupart des pays développés. Ce taux n’est pourtant que la moitié du taux Africain de natalité.
Il est devenu tabou d’évoquer la surpopulation.
D’ailleurs, tout sujet non admis par la propagande insidieuse, sournoise, efficace est frappé d’interdit et ceux qui sortent de la pensée officielle sont diabolisés, ostracisés, disqualifiés comme « radicaux », « intégristes », « extrémistes ».
Car, d’une part, les traditionalistes tenants du « croître et multiplier », d’autre part, les « libéraux économistes » addictifs à la croissance, veulent toujours plus de jeunes « pour payer les retraites des vieux, de jeunes qui consomment, qui innovent, qui dynamisent une économie devenue culte ».
Pour nos bonimenteurs formatés, beaucoup de jeunes font la prospérité, l’opulence d’une société.
C’est bien connu et le contraire se vérifie tous les jours : En Egypte, en Algérie, en Ethiopie, la population est jeune. En résulte-t-il une qualité de la vie enviée par les « vieux Luxembourgeois », pays le moins densément peuplé et le plus prospère de la zone Européenne ?
Comme quoi, quand le conformisme bêlant s’en mêle, les idées reçues peuvent être absurdes.
En 1945, la France comptait quarante millions d’habitants et saignée par la guerre, sous l’impulsion sociale et généreuse du Conseil National de la Résistance, instaurait la retraite des salariés, l’Etat providence, la prévalence de l’intérêt général sur l’esprit de lucre et de profit individuel.
Aujourd’hui, la France compte soixante cinq millions d’habitants et après soixante ans de paix, de croissance continue, d’augmentation de la productivité du travail, les « libéraux » remettent en question les droits sociaux des salariés, acquis à la Libération.
Quelle édifiante illustration de l’échec de la croissance perpétuelle, de l’imposture des recettes du capitalisme !
La démographie en expansion infinie s’alimente au « jeunisme » d’une époque qui fait de l’avancée en âge une maladie et qui traite ses anciens comme des déchets, des objets qui ont fait leur temps et que condamne un inéluctable déclin.
Certes, existent des maladies susceptibles d’apparaître avec l’âge, mais, comme cela fut chanté : « le temps ne fait rien à l’affaire. Quand on est con, on est con ».
Les humains âgés ne sont pas des déchets, des rebus qu’une retraite imposée oriente vers les cimetières.
Parce que fondée sur une compétition obsessionnelle, la rentabilité maximisée, la société contemporaine, sans même mesurer ses crimes, réifie les êtres.
Le 8 avril 1968, des scientifiques, des philosophes constituaient le Club de ROME qui dénonça les conséquences désastreuses de la croissance démographique .
En 1974, l’ONU déclara l’année de la population.
Aujourd’hui, les traditionalistes et le conformisme qui font loi interdisent d’évoquer ce problème.
D’ailleurs, les démographes béats vous diront : « Il n’y a pas de problème, car lorsque l’humanité atteindra dix ou douze milliards de spécimens, elle connaîtra une pause relative de son accroissement ».
En France, 168 hectares disparaissent chaque jour sous l’asphalte et le béton, soit l’équivalent de la superficie d’un département tous les sept ans.
Les détenteurs de la parole publique dissertent volontiers sur les gaz à effet de serre et le réchauffement climatique en se gardant de dire que ce phénomène résulte d’abord de la surpopulation planétaire.
Plus d’humains, c’est davantage de transports, d’urbanisation, de consommation d’énergie, de surpêche, de surexploitation de toutes les ressources.
La pression démographique compromet la survie de la biodiversité, car il n’y a plus de places pour la nature : plus de forêts primaires, plus de zones humides, plus d’espaces pour les grands animaux.
Les océans sont pillés et les bateaux de pêche industrielle doivent aller de plus en plus loin pour effectuer des captures de plus en plus laborieuses.
Des lobbies en tous genres veulent aseptiser les milieux naturels pour en tirer le maximum de profit.
Non, l’altération du climat ne me paraît pas constituer le péril premier. Dans l’histoire du globe, il y eut bien d’autres fluctuations thermiques d’ensemble.
Ce qui est grave et moralement inacceptable est la mort de la diversité du vivant.
Bien sûr, de tous temps, des espèces disparurent. D’autres surgissaient alors car la nature n’est jamais en équilibre définitif. Avec l’anthropocène, outre un appauvrissement accéléré des disparitions, nous assistons à une rupture du moteur biologique planétaire de l’évolution.
L’homme anéantit la biodiversité sans permettre l’émergence naturelle de nouvelles espèces. Il casse le processus de l’évolution.
Sur la lancée actuelle, la nature n’aura plus de place en Europe, d’abord, puis sur l’ensemble de la terre. Le mal n’adviendra pas dans un avenir incertain. il se déroule présentement.
Alors, on se tait pour ne pas éveiller les consciences et laisser les adeptes du « croissez et multipliez » perpétuer leur biocide généralisé ?
Tant pis pour leur censure, leurs injures,nous refusons la cancérisation de la terre par une seule espèce.
Pour prévenir la catastrophe en cours, il faut stopper la croissance démographique ?
Comment ?
Parce que je préfère Eros à Thanatos, l’hédonisme altruiste aux morales mortifères, je tiens à condamner toute solution visant à réduire la population par l’abandon du seul combat qui vaille : celui contre la mort.
Il faut assurer à tout être vivant, donc à tout humain, la jouissance d’une vie longue, agréable, exempte autant que possible de souffrance et d’affaiblissement.
La vieillesse n’est pas nécessairement un naufrage et il faut la réhabiliter.
L’allongement de la durée de la vie est un vrai progrès et toute mort marque encore l’échec de la médecine.
Ce n’est point par le « soleil vert », ni par une « bonne guerre », par un refus de soins que passe la solution à la surpopulation.
Pas de cercueil pour guérir la terre, mais moins de berceaux !
Cessons d’inciter financièrement à la prolifération.
Puisqu’une des grandes conquêtes contemporaine fut de dissocier sexualité et fécondité, invitons à jouir sans procréer, à faire moins d’enfants.
Les allocations familiales doivent être attribuées sous conditions de ressources et ne plus être versées au-delà du deuxième enfant.
Plus de médaille pour les mères de famille nombreuse, plus d’avantages sur les durées de cotisations ouvrant droit à la retraite pour celles et ceux qui ont procréé d’abondance, retraite facultative, toujours dans cet esprit de réhabilitation de la vieillesse.
Autrefois, les Etats et en particulier les dictatures voulaient beaucoup d’enfants pour garnir les armées, peupler de colons les territoires conquis, fournir aux exploiteurs des masses de travailleurs consommateurs.
Aujourd’hui, un exploitant agricole mécanisé fait en une heure de travail autant que 150 paysans du début du siècle passé.
Les robots, les plates-formes téléphoniques, les caisses automatisées des super-marchés, les péages électroniques des autoroutes suppriment massivement les emplois.
Si pour BALZAC, « toute femme qui accouche offre un otage au malheur », il est certain qu’aujourd’hui, elle risque de générer un futur chômeur condamné à vivre dans un monde infernal, de bruit, de béton, d’asphalte, de pollution, dans un monde sans oiseau, sans insecte, sans vie sauvage.
A la différence de nombre de nos amis écologistes, je ne prône pas un retour à un âge d’or qui n’exista jamais, à une austérité ascétique, à une vie étriquée.
Mais si nous voulons des hommes heureux, prospères, aimant la vie, ils ne doivent pas cancériser la terre et méritent de se réconcilier avec le vivant.
La vie est la première valeur.
La liberté est la deuxième.
Aussi, exécrant tout fascisme, fut-il habillé de vertu, je récuse la loi autoritaire de l’enfant unique, modèle Chinois.
Chacun doit conserver la liberté de mode de vie.
En revanche, par la culture, par les aides sociales, il convient d’orienter autrement la politique pour en finir avec un natalisme bête et suicidaire.
Un enfant a tellement besoin d’amour, de soins, d’attentions, que point trop il n’en faut.
Gérard CHAROLLOIS
J'y soulignerais volontiers, l'impact et le poids qu'une culture "organisée" (et qui n'est bien sûr pas que franco-française), exerce encore avec beaucoup d'influence et d'obédience.
Cette "idée" que "plus on est nombreux, plus on est fort" est bien de nos jours galvaudée dans ses résultats.
Ainsi, un couple qui n'aurait qu'un seul enfant (volontairement ou pas), passe encore soit pour "égoïste", soit pour "impuissant" et jugé quelque peu non productiviste d'une participation à une croissance-référence -moderne ...
Je crains qu'il faille encore pas mal de temps, que j'ai bien du mal à savoir évaluer, pour que des obédiences, laïques, politiques et religieuses arrivent à corriger (voire détruire) le message nataliste qu'elles osent encore manipuler.
Pour ce qui concerne le vivant animal ou végétal, la régulation et l'organisation naturelle d'un "natalisme", s'opère et s'effectue sans aucun problème ... du moment que l'homme ne vienne surtout pas y mettre son nez !
Tiens, une dernière anecdote (un peu hors sujet, désolé) : une grosse activation des conflits familiaux, parfois graves, se situe par rapport aux partages - héritages - divorces -donations, etc., multipliés par le nombre d'enfants (et de "parents")...