Après les ères des tribus, des cités, des nations, des empires, des identités meurtrières, des races et des communautés fermées, que vienne le temps du biocentrisme.
Ce concept s’oppose au théocentrisme et à l’anthropocentrisme qui mettent les mythes ou une espèce élue au centre.
En revanche, le biocentrisme ne s’oppose pas à l’humanisme. Il l’englobe, en considérant comme des acquis irréversibles ses conquêtes politiques. Il élargit le cercle de l’empathie.
Tout être éprouvant le principe du plaisir déplaisir vaut, quelles que soient ses performances dans le déchiffrage par l’intelligence du grand livre du monde ou celles à courir vite.
L’individu vaut parce qu’il peut souffrir et non par ses capacités cognitives ou ses aptitudes physiques.
Le biocentrisme répudie ainsi tant le spécisme que le racisme dès lors qu’il ne reconnaît qu’une communauté : celle des vivants.
Point n’est besoin, pour le biocentriste, de postuler l’absence de différences, voire d’inégalités dans les diverses performances, puisque le fondement éthique réside dans l’intérêt à être.
Tout vivant possède un intérêt équivalent à ne pas être torturé, maltraité, asservi, soumis à la contrainte.
Nos sociétés ne s’élèvent pas encore à ce stade de prise de conscience de l’unité fondamentale du vivant.
Nos contemporains perdurent à traiter les animaux comme des marchandises et à contester le droit de toutes les espèces dites sauvages à peupler la terre.
Les conformistes bêlant raillent les femmes et hommes de mieux qui osent dénoncer les « saines traditions sanguinaires », tellement admises par les foules serviles.
Pour eux, contester la chasse, la corrida, le gavage, la vivisection, l’élevage concentrationnaire, trahit son « zoolâtre » extrémiste.
Voyons, dit le formaté : « cela s’est toujours fait ».
Le processus mental est identique à celui qui justifiait, autrefois, l’esclavage, la torture des suspects, le bûcher des impies et qui, dans certains pays, de nos jours encore, justifie le confinement des femmes, la mise à mort des homosexuels et, de temps à autres, l’égorgement des infidèles.
Le mal existe et endeuille la terre.
Sans prendre la mesure de la nocivité de sa maîtrise absolue, l’homme ose énoncer que les grands herbivores dévastent ses cultures, que les prédateurs attaquent occasionnellement ses troupeaux, que des oiseaux lui disputent ses céréales ou ses poissons.
Selon une information énoncée par des biologistes, 95% des vertébrés présents sur terre aujourd’hui sont des humains et leurs animaux d’élevage et ne restent que 5% d’animaux dits sauvages.
L’homme apprendra-t-il à temps à maîtriser sa maîtrise ?
Cessera-t-il de croître et multiplier jusqu’à emplir la terre ?
Reconnaître à la nature et aux animaux le droit de vivre assure corrélativement le triomphe des droits de l’homme, si souvent bafoués ici et là aux noms des religions, des dictatures, des raisons d’Etat, des " justes guerres ".
En France, des esprits obscurantistes et féroces proclament « nuisibles » des êtres qui ne font que survivre malgré les persécutions.
Or, d’un point de vue éthique, l’aseptisation en cours est inacceptable.
Certes, la biodiversité ne doit point préjudicier à quelques individus ou groupes sociaux.
Ainsi, concrètement parlant, illustrant notre propos par un exemple, si les loups, les lynx et les ours affectent l’élevage ovin, la collectivité doit remédier aux préjudices subis par une catégorie sociale en subventionnant la biodiversité, c’est-à-dire en liant la « fonctionnarisation » en cours de l’élevage de montagne à la protection de la faune sauvage.
Puisque 50% du revenu des éleveurs proviennent, desdites subventions, il suffit d’en subordonner l’attribution à la présence des ôtes naturels des bois.
Lesdits éleveurs pourront ainsi, à l’instar de leurs homologues Italiens qui partagent les Abbruzes avec six cents loups, adopter de simples mesures de protection efficace, à savoir gardiennage des troupeaux et confinement nocturne.
Il y a malheureusement encore à ce jour des hommes thanatophiles, occupant le brouhaha médiatique, avec leurs élucubrations sur le thème du « grand méchant loup », dévoreur de petits enfants. Ils disent collecter dans les registres paroissiaux du Moyen-âge des histoires d’attaques de loups contre l’homme.
Pour se convaincre de l’insignifiance des assertions de ces « chercheurs » contre nature, il suffit de rappeler qu’en Italie, en Espagne où survivent 1500 loups, pas la moindre attaque d’humain n’est à déplorer.
« Qui veut tuer le loup, l’accuse de la rage ».
En revanche, en Asie, le tigre dévore occasionnellement le bipède. Cela appelle des mesures de précautions, mais nullement l’extinction de l’espèce.
Il est douloureux qu’un tigre tue un homme, mais ne l’est-il pas qu’un homme tue un tigre ?
Le biocentrisme fut promu, expliqué, illustré par notre regretté ami Jean-claude HUBERT, vice président de la CVN, auquel je dédie mon éditorial de cette semaine, trois ans après sa disparition brutale.
Il n’aura pas assisté à l’émergence de ce monde meilleur dans lequel l’humain, loin de renoncer au vrai progrès, celui des connaissances et de la conscience, élargirait le cercle de l’empathie au vivant, tournant résolument le dos à la haine, au mépris, à la sottise dont le racisme stupide et le spécisme cruel sont les excroissances.
Contre ces tares de l’esprit, contre ces abaissements de la dignité humaine, affirmons notre détermination à éradiquer le négationisme des droits du vivant.
Gérard CHAROLLOIS
Je rends hommage moi aussi, ainsi que les membres du CLAN à notre regretté Jean-Claude Hubert