S’obstinant à édifier, au profit de la société VINCI, l’aéroport de NOTRE DAME DES LANDES, le pouvoir exécutif, ami de la finance qui possède des noms, des visages et qui fait les élections, envisage d’interroger la population, par référendum local.
Les électeurs de LOIRE ATLANTIQUE décideront peut-être, dans les mois à venir, du sort d’un site naturel en optant « pour » ou « contre » l’aéroport de la discorde.
Qui pourrait réfuter le procédé ?
En démocratie, tout pouvoir émane du (peuple) et le (peuple) n’est ni la communauté des dominés, ni celle des dominants. Le (peuple) est tout le monde, du moins, la collectivité des électeurs, à un moment donné et dans une circonscription donnée.
Or, une collectivité d’humains fluctue, avec le temps, dans sa composition et dans ses opinions.
Faut-il détruire la nature et bétonner des milliers d’hectares à NOTRE DAME DES LANDES ?
Si le (peuple) avait été consulté en 1974, à la naissance du projet, ne doutons pas que plus de 90% des citoyens auraient préféré les avions aux amphibiens.
Il me paraît probable que dans trente ans, 90% des citoyens de demain, rejetteraient cette lourde infrastructure, fruit d’un mode de « développement » contraire à l’intérêt général de la préservation de la biodiversité, de la qualité de la vie, de la sauvegarde de l’atmosphère.
Nous sommes en 2016, époque non pas de transition, mais de mutation.
Façonnés par des médias sous contrôle de la finance, par des élus majoritairement issus de partis archaïques, les contemporains risquent fort de faire le « mauvais choix », au nom de la croissance, du développement, de l’emploi, de la mobilité, de tous ces éléments de langage dont se pare l’imposture des bétonneurs et empoisonneurs.
La démocratie directe permit toutes les dérives autoritaires du siècle passé : HITLER, STALINE, MAO en appelaient au (peuple), subjuguant les masses, soulevant les foules, recourant à la voie plébiscitaire pour avaliser leurs dictatures.
Les politologues parlent de « césarisme démocratique », lorsque le (peuple) et le guide fusionnent dans une adhésion ardente, dans un élan d’enthousiasme, abolissant l’esprit critique.
Toutefois, ce qui est problématique dans le « césarisme démocratique » n’est pas le « démocratique », mais le « césarisme ».
La démocratie directe comporte un versant autoritaire, démagogique, dangereux pour les droits des minorités.
La démocratie représentative, préférée par les corps intermédiaires, comporte le risque d’une fracture entre les « professionnels de la politique » et les citoyens, ces professionnels cessant d’être une véritable élite et devenant une oligarchie.
L’élection ne prémunit nullement contre les choix désastreux, nocifs pour les peuples et pour la biosphère.
Quelle affliction devant les succès électoraux de partis islamistes, dans des pays Arabes, de Donald TRUMP aux primaires républicaines des USA, de partis nationalistes et religieux en Israel, d’un Laurent WAUQUIEZ en région Auvergne Rhône Alpes !
En choisissant le fanatisme, l’obscurantisme, la haine, la violence, la soumission aux injonctions des intérêts privés contre l’intérêt général, en optant pour la guerre, les traditions, le repli communautariste, la destruction de la nature, les peuples, très démocratiquement, préparent leurs malheurs.
Seraient-ils frappés de sadomasochisme ?
Ils semblent préférer ceux qui leur promettent, hier, du sang et des larmes, aujourd’hui, des sacrifices, des efforts, de la concurrence féroce .
Bien sûr, les citoyens apprécient les leaders qui se proposent de frapper l’autre, le voisin.
La conduite de la chose publique est complexe, exige connaissances et réflexions.
Elle s’accommode mal des emportements, de la cupidité et si les bons sentiments ne suffisent pas à faire une bonne politique, il est acquis que les mauvais conduiront toujours à d’insondables désastres.
Par la propagande flamboyante des totalitarismes d’antan, esthétisant la politique, et la propagande, aujourd’hui, d’acculturation des acheteurs de « temps de cerveaux disponibles », il est aisé d’égarer ou d’anesthésier les consciences et la raison d’un peuple.
Pour répondre à ses objectifs, la démocratie doit rencontrer des citoyens éclairés, informés, libres de leurs choix à l’issue d’une loyale connaissance des faits.
Tout journaliste devrait s’inspirer du « Choses vues » de Victor HUGO.
Or, ici et maintenant, une manifestation de cinquante personnes « Pour » ou « Contre » l’islam ou les migrants, sujets obsessionnels dans certains milieux intellectuels, fera l’objet de titres et longs commentaires dans la presse formatée.
Les manifestations de six cents personnes contre la chasse, de trois mille en faveur du loup seront censurées.
Les journalistes, en privilégiant, l’information, déforment les faits et alimentent les débats malsains.
Faute d’une information équilibrée, loyale, ouverte, la démocratie directe ou représentative restera imparfaite, altérée, orientée.
Des faits sont exploités et d’autres occultés.
Des débats, des chocs de civilisations sont exacerbés, y compris par ceux qui ont la haine d’eux-mêmes. D’autres enjeux sont tus.
Néanmoins, nous n’avons rien trouvé de mieux que la démocratie et il convient d’en analyser les ressorts pour pallier aux inconvénients du système.
Sans entrer dans les détails, il m’apparaît, pour le moins, regrettable que des rois du béton et des travaux publics puissent s’offrir des organes de presse audio-visuelle ou écrite.
Ils ont trop d’intérêts, en promiscuité avec la puissance publique, pour, sans grand risque pour la démocratie, acquérir les moyens de contrôler l’opinion et de faire les élections.
Il conviendrait, en outre, de prévenir les conflits d’intérêts en soumettant les engagements de fonds publics au profit de groupes privés à un strict contrôle juridictionnel assorti de sanction rigoureuse à l’encontre des élus utilisant leurs fonctions pour détourner des fonds à l’occasion de marchés publics.
Renforcer le pouvoir de la cour des comptes, établir un lien entre cet organe de contrôle et l’institution judiciaire pour assainir la politique, en écartant de manière définitive, les décideurs coupables de délits en relation avec les fonctions électives.
Il y aurait ainsi protection des deniers publics et abandon de beaucoup de ces projets dispendieux, calamiteux pour la nature.
Lutte contre la corruption et écologie y trouveraient leurs comptes.
Gérard CHAROLLOIS