(résumé par Jean-Marie CLAVEL)
novembre 25th, 2010
BREVE OBSERVATION SUR « LES TEMPS BIOLOGIQUES »
La pensée, chez Jean-Claude Hubert, est « ce magnifique mouvement des mémoires ». Or, qui dit mouvement, dit évolution, bouillonnement, circulation et donc changement. Ainsi, puisqu’il y a plusieurs mouvements de mémoire chez les hommes, la pensée et la mémoire des hommes se transforment et se restructurent constamment.
Hubert en conclut que la pensée et la mémoire des hommes se composent d’un cumul d’existences particulières qui, bien que suffisamment distinctes pour être identifiées, ne sont pas suffisamment éclatées pour être séparées, cloisonnées et indépendantes les unes des autres. Il existe donc toujours un mélange, un enchevêtrement des différentes pensées et des mémoires malgré leur évolution et leur transformation.
Pour Hubert, la pensée évolue en se découpant (mais sans supprimer les éléments de la découpe) en trois approches :
. l’approche cyclique avec ses aspects fondamentaux spécifiques
. l’approche linéaire avec ses propres fondamentaux
. la nouvelle approche du biocentrisme et ses constantes.
L’approche cyclique
Les fondamentaux de l’approche cyclique concernent la nourriture, l’habillement et la migration. La chasse, la pêche, la cueillette donc la nature, la quantité du gibier, l’abondance dans les cours d’eau, le climat, le feu, le vent et la végétation sont les rouages essentiels de la vie. On est dans l’absence d’écriture et d’Histoire.
Les fondamentaux humains de l’approche cyclique sont la nomadisation, la vie regroupée en tributs, l’oralité, la parole, le cri. La gouvernance se fait par le matriarcat : la femme reproductrice est prépondérante parce qu’elle est maîtresse de la fécondité et de la vie.
L’approche linéaire
Les civilisations cycliques ont été transformées progressivement en adoptant l’agriculture. Elles ont totalement disparu, anéanties. L’invention de l’écriture est la révolution technologique qui détruit l’oral.
S’il y a écriture, il y a forcément un passé. S’il y a un passé, il y a un futur. Donc une date, une chronologie et finalement une Histoire. S’il y a Histoire, il y a le temps. S’il y a Histoire, il y a un commencement et une fin. Le religieux jugera alors que la création (un commencement) a eu lieu et que par conséquent il y aura un jugement dernier (une fin).
S’il y a un commencement et une fin, c’est qu’il y a donc des causes. Cela veut dire qu’il n’y a pas de renouvellement systématique des choses comme dans l’approche cyclique (on n’attend plus les saisons, les fruits, les migrations, les reproductions, etc.).
Avec les causes, on se disculpe on se défile aussi. On recherche des causes extérieures à son propre destin. On en vient au dualisme du bien et du mal, du pour et du contre, du blanc et du noir… La découverte des causes donnent naissance à l’universalité des choses et des êtres, à l’hérédité et surtout à la hiérarchie avec l’arrivée des dynasties héréditaires qui disent éviter ainsi les guerres de succession et de possession. Mais qui dit hiérarchie dit aussi servitude, prestige, stabilité, longévité, acceptation peu démocratiques, déséquilibres.
L’invention de l’agriculture est une autre révolution technologique de l’approche linéaire. L’agriculture supprime le nomadisme de l’approche cyclique au profit de la sédentarité. Les travaux agricoles, les récoltes et les réserves alimentaires et autres doivent être protégées et gardées. Des fortifications sont mises en place et des armes sont inventées et forgées pour cela. De plus, les bras devront être de plus en plus forts et de plus en plus nombreux pour semer, élever, récolter, transformer et transporter. Le patrimoine va donc se constituer. Il va falloir le défendre.
La prépondérance de la femme (qui est chef dans l’approche cyclique parce qu’elle est la reproductrice) est remplacée par le défenseur du patrimoine. Il faut protéger les récoltes contre toutes les espèces de prédateurs. Le patriarcat se substitue ainsi au matriarcat.
Mais l’apprentissage de l’écriture est difficile. Le transport de l’écriture aussi. Les supports de bois, de pierre, d’argile puis de peaux sont d’un maniement lourd, délicat et très lent. Finalement, seules quelques castes accèdent à l’écriture. Elles vont constituer une élite quasiment ésotérique. Ces castes privilégiées sont aidées et « favorisées » par la résistance farouche des peuples à la civilisation orale qui luttent contre la nouvelle adoption de « l’écrit ».
Les conséquences de l’approche linéaire ont créé deux modes de pensée :
. le théocentrisme, centré sur Dieu et le monothéisme : judaïsme, christianisme, islamisme
. l’anthropocentrisme, centré sur l’homme : les philosophies d’humanismes.
L’approche linéaire apporte la connaissance et favorise l’apprentissage, l’enseignement et le savoir.
La nouvelle approche du biocentrisme
Aujourd’hui, l’approche cyclique et l’approche linéaire sont au bord de la débâcle. Les humanismes, les idéologies n’ont plus court. Les fondateurs sont absents. Les vertus « n’ont plus la cote ».
De nouveaux fondamentaux se substituent aux anciens, c’est le biocentrisme qui se définit par :
. l’interactivité qui supprime les causes
. le référentiel, le révisable qui remplacent la règle classique, le postulat ou le dogme : chacun peut faire son choix existentiel et justifier sa règle du moment selon sa situation
. le media, l’image, la couleur, le son et le temps réel qui remplacent et éliminent la difficulté de l’apprentissage, de l’oral et de l’écrit.
Ce nouveau mode de pensée qu’Hubert appelle le Biocentrisme utilise des « constantes » telles que :
. la participation des uns et des autres, c’est la démocratie participative
. la coévolution sans distinction de tous les êtres quels qu’ils soient, du moment qu’ils sont vivants
. l’interdépendance, la compréhension et la compassion entre tous les vivants
. l’abandon de tous les clivages (sexes, professions, politiques, sociaux, économiques, etc.)
. le culte du vivant pour le vivant
. la prévention, la défense, les médecines douces
. le commerce équitable, l’éthique, tant pis si on produit moins mais on doit mieux distribuer
. l’enfant est le référent
. la semaine est banalisée, les magasins ouverts 7 jours sur 7 et de nuit, l’écologie, l’éthologie, la bionomie, l’agrobiologie, les bioénergies, les biocarburants, l’homéopathie, l’architecture bioclimatique, le principe de précaution, la suppression de la violence, le droit au plaisir, féminisation, parité, protection des animaux, enfant-roi, le multi-culturel, le multi-politique, la journée de la femme, des maris, des arbres, des fleurs, etc., etc.
On le voit, le champ est immense de l’ouverture des temps biologiques auxquels nous sommes conviés et auxquels Jean-Claude Hubert nous invite tout en nous prévenant.
MERCI, MERCI JEAN-CLAUDE...
Jean-Marie CLAVEL
vice-président http://www.tousvivants.fr