Pour l’abolition du loisir de mort.

La presse régionale va sortir ses piteux marronniers sur le thème de l’ouverture de la chasse, des bons copains souvent bredouilles mais tellement heureux de traquer les bêtes des bois et des champs, avec le fidèle chien et les petits matins bleutés d’automne.
Image bucolique convenue supposée attendrir le lectorat ruraliste, poncif bien peu de nature à  stimuler les neurones.
En fait, l’ouverture générale de la chasse est précédée de multiples dérogations et dans six mois, la clôture sera suivie d’autant d’exceptions qui font, qu’en ce pays, la chasse ne ferme jamais très bien.
Qu’est-ce que la chasse en Europe, aujourd’hui ?
Un lamentable passe-temps, un rituel guerrier, consistant à tirer sur des animaux d’élevages, ombres artificielles de ce qui fut naguère une faune riche, diversifiée, sauvage, généreuse.
La chasse intensive, l’agrochimie empoisonneuse, les infrastructures de transports, l’urbanisation, l’assèchement des zones humides, la mutation des forêts en usines à bois, l’omniprésence et la cupidité des hommes les amenant à exploiter tous les milieux, toutes ces agressions ont anéanti la faune.
Les quatorze millions de faisans, les milliers de  lièvres importés, le million de  canards colverts, les cinq millions de perdrix d’élevages relâchés chaque année, sans oublier les sangliers croisés de porcs domestiques gavés au maïs, toutes ces malheureuses victimes alimentent un stand de tirs minable où d’étranges individus vont de parkings-chasse en parkings-chasse aérer leurs gros fusils.
La faune sauvage, la vraie, est persécutée  par ces « gestionnaires » de la nature qui vitupèrent contre les renards, les blaireaux, les fouines, les lynx, les loups qui ne survivent que marginalement dans un univers dénaturé.
Lorsque l’élevage intensif génère des maladies, les pouvoirs publics incriminent ce qui persiste de nature. Les vaches ont-elles la tuberculose ? C’est la faute aux blaireaux.
Les moutons des éleveurs subventionnés de montagne développent-ils la brucellose ? C’est imputable aux bouquetins qui doivent disparaître du massif du BARGY en HAUTE SAVOIE. La ministre de l’écologie veut « assainir » la montagne, propos nauséabonds moralement, stupides scientifiquement, dès lors que les massacres de bouquetins provoquent des déplacements d’animaux et donc des propagation de la bactérie.
Ne cherchez pas une analyse honnête de la  chasse, sous les plumes conformistes.
Nul ne s’interrogera sur ce qui peut déterminer un homme à jouir de l’effroi et de la mort qu’il inflige à un animal qui ne lui a rien fait.
Nulle plume servile, soucieuse de ne pas déranger un lectorat assoupi, n’évoquera le silence de mort régnant désormais dans les campagnes désertées par les oiseaux.
Il faut bien que les gens s’amusent à traquer, mutiler, fusiller ce qui palpite et qui saigne.
Et puis, sans la chasse, vous savez bien, » le sanglier prolifère, retourne les pelouses des petits bourgeois, effraie les grands-mères en venant jusque dans les villes semer la terreur ».
La lourde propagande des chasseurs distille la peur des animaux, peur parfaitement absurde.
Il est impératif de « réguler » car « il y aurait trop de bêtes sans la chasse ».
Et puis, « le chasseur est un protecteur de la nature avisé, sans lequel il n’y aurait plus de bêtes » !
Toute propagande n’est qu’un art de mentir et de duper.
Invitée à débattre sur la chasse par une station de radio nationalement écoutée, le lundi 15 septembre à dix heures, la CONVENTION VIE ET NATURE apprend que le lobby chasse refuse de confronter des arguments mais exigeait une émission unilatérale, sans contradicteur.
C’est qu’en dehors des attaques personnelles méprisables et ridicules, les injures décernées aux protecteurs de la nature, les propagandistes du loisir de mort peinent à défendre une pratique parfaitement incompatible avec la situation matérielle et morale de nos sociétés.
La chasse méconnaît le caractère sensible de l’animal et c’est ce qui la condamne d’un point de vue éthique.
Elle participe de la destruction de la biodiversité comme l’illustre tragiquement l’anéantissement, par la seule chasse, de la population ursine des Pyrénées.
La chasse gangrène la vie politique en exerçant une confiscation de la gestion de la faune, de l’espace rural et en avilissant les politiciens de ce pays, marionnettes s’agenouillant devant un lobby rétrograde.
Les lois et règlements ne protègent ici que le chasseur bien que celui-ci se raréfie d’année en année.
Sans ses structures corporatistes, sans les privilèges institutionnels conférés par les politiciens depuis des décennies, le monde de la chasse ne pèserait pas lourd et nous pourrions nous réjouir de constater que les strates les plus jeunes et les plus éduquées de la population se détournent du loisir de mort.
Mais, le lobby tient l’Etat et les moyens financiers colossaux dont il dispose lui permettent d’occuper le terrain, d’arroser les médias d’articles et de contacts, de tenir ici et là des stands à la gloire de l’art de tuer.
Face aux tueurs, comme toujours dans l’Histoire, les plus timorés louvoient, hésitent, n’osent pas résister et servent de cautions à un lobby et à une activité nocifs.
En France, la chasse est un abus : abus de temps d’ouverture, (le plus long d’Europe), abus la liste d’espèces soumises à la chasse, (la plus longue d’europe), abus la chasse de nuit des oiseaux d’eau, abus les piégeages de petits oiseaux à la glue, au filet, à la tendelle, à la matole, abus l’arrogance et la cruauté de la chasse à courre survivance grotesque de la féodalité, abus l’emprise des chasseurs sur l’espace rural, abus le poids de ce loisir au parlement et dans les coulisses du ministère.
Alors, l’argent peut dissimuler un temps ces vérités, ces faits qu’il faut taire.
Un temps seulement.
Dans ce monde devenu si hostile à la vie sauvage, il faut arrêter la guerre faite aux animaux de la nature et instaurer enfin une relation de bienveillance, de respect et, pour nous, d’amour avec le vivant.
Face aux tueurs, nous affirmons notre radicale opposition.
Car, abolir la chasse, c’est accéder à un degré plus élevé de civilisation puisque ce loisir exalte la pulsion de mort.


Gérard CHAROLLOIS


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