Les « éléments de langage ».

En France, à l’instar des autres « démocraties », les partis politiques se dégradent en écuries de courses aux fauteuils et palais nationaux où se pressent des professionnels regroupés en clans.
Un clan est-il au pouvoir :
Les autres dénigrent, vitupèrent, invectivent systématiquement et à priori.
Le fond n’a rien à voir avec ces invectives de théâtre.
L’important, pour le professionnel de la politique, est de déloger les occupants pour s’installer à leurs places, sous les lambris de la République.
Quant au fond, aux convictions, aux idées, aux valeurs, l’indigence le dispute au conformisme et à l’imposture.
Voici les clés de cette imposture, le décodage de leurs « éléments de langage », discours type, inlassablement matraqué :
« Il faut retrouver la croissance, Relancer la production, accroître la compétitivité de nos entreprises, faire des économies, atteindre les équilibres budgétaires, contenir la dette  publique que vos enfants devront payer à vos enfants’’’’ ».
Or, la croissance, la production, le développement signifient de la pollution, des nuisances, des destructions de nature, de l’exploitation des ressources, des êtres vivants, donc de la négativité.
Nous vivons sous le joug d’une religion tout aussi obscurantiste que toutes les autres : l’économie.
Les partis politiques qui se disputent les attributs du pouvoir célèbrent tous  ce culte en dissimulant par  des « éléments de langage », leur dogmatisme et leur soumission à la dictature du Marché et de la finance.
Les « conseillers en communication » masquent par les  éléments de langage les échecs, les impasses, les crimes  imputables à cette religion dont la nocivité  rejoint celles des autres.
Comme toutes les religions, l’économie a ses rites, ses dogmes, ses prêtres et son conditionnement culturel insidieusement entretenu par les médias propriétés des oligarques.
Mais, diront les crédules, les « démocraties » sont pluralistes, avec des élections libres, des partis  politiques rivaux dont la constitution dépend des citoyens dotés de la prérogative de « changer le système », donc de saper la dictature du Marché.
Pour le crédule, le système globalisé n’a aucune ressemblance avec les théocraties et totalitarismes du passé.
Plus performante que les grossiers totalitarismes du siècle passé, la religion de l’économie a assimilé qu’un système mondialisé pouvait sans crainte tolérer des réfractaires, des décalés, des immunisés contre ses valeurs, minorité que l’on peut tolérer dès lors qu’elle ne coupe pas la main invisible du Marché et qu’un contrôle des masses grégarisées assure sa pérennité, son règne.
L’absolutisme économiste n’a que faire des procédés violents, brutaux, déplaisants en la forme des systèmes totalitaires d’antan.
Sa technique de domination est insidieuse. L’économisme dit libéral peut même célébrer les Droits de l’homme, en s’accommodant tout de même de leurs violations pourvu que le commerce soit libre.
Et voilà pourquoi, quand les peuples s’agacent, râlent, grognent, ils votent pour les plus zélés servant du culte économique.
Ces peuples acculturés élisent volontiers  ceux qui prônent la loi suprême de l’entreprise, avec abandon des normes d’urbanisme (freins au bétonnage), fonte du code du travail (entrave à la libre exploitation des salariés),  instauration de la libre concurrence et de la mondialisation des affaires (occasions de dumping social et écologique).
Il faut dire que face aux partis conservateurs, les partis dits de gauche ont capitulé en adoptant les mêmes « élément de langage », célébrant les mêmes sornettes.
Mais, il n’y aura plus de retour à la « croissance » des trente glorieuses, ce dont il convient de  se réjouir, car la croissance génère l’anéantissement de la vie.
Un langage de vérité et de progrès dirait la nécessité de repenser le mode de développement, non pas pour régresser et se restreindre, mais pour vivre mieux, pour mieux redistribuer, pour valoriser la qualité et le vivant.
Pour nos médias, bulletins paroissiaux de l’économisme, la question ressassée est de savoir si le nouveau premier ministre gratifiera plus ou moins les entreprises privées que ne l’aurait fait ceux du clan opposé.
En revanche, qui se soucie de sa perversité tauromaniaque ?
Nos contemporains, confrontés aux agressions contre leur environnement immédiat, sont tellement formatés qu’ils n’osent pas, lorsqu’il dénoncent les implantations d’infrastructures lépreuses, dans leur cadre de vie, mentionner les atteintes à la faune .
Il faudrait presque s’excuser d’évoquer l’essentiel qui n’est ni la valeur de leur pavillon invendable en raison de l’éolienne ou de l’élevage de porcs limitrophe, ni la perte de leur vue « imprenable » sur la mer ou la montagne. L’essentiel, c’est la vie que l’on massacre, que l’on maltraite.
Alors, contre la religion économique, contre son culte et ses grands prêtres, blasphémons.
Blasphémons, en rappelant qu’une entreprise privée n’a pas pour objectif de créer des richesses et des emplois mais uniquement des profits,
En proclamant que la croissance cancérise la planète, la pille, l’artificialise, la stérilise, en constatant  que l’esprit de compétition rend l’homme mauvais.
Parce que la vie prime sur l’économie, aspirons à la constitution d’une Organisation Mondiale des Droits du vivant contre la loi du commerce, celle des firmes.
Les écologistes politiques, ici et maintenant, trop souvent silencieux sur l’essentiel, c’est-à-dire sur la protection de la nature et la défense animale, si souvent piètrement anthropocentriques, ont raison de ne pas participer à un gouvernement qui ne sera pas de rupture.
Ils auraient néanmoins raison de soutenir ponctuellement ce gouvernement car, en l’état, se substituerait à lui, en cas d’élections législatives, non pas  un pouvoir meilleur, mais les intégristes du « libéralisme économique », péril évident que révèle les dernières élections municipales.
Une autre offre politique reste à construire.

Pour l’arbre, l’animal et l’homme, il faut penser une alternative tournant le dos au mythe de la croissance infinie, une alternative proposant de mettre le vivant à l’ordre du jour.

Gérard CHAROLLOIS.


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