Empruntant le titre d’un ouvrage de Patrick BOUCHERON, je m’interroge et annonçant la chute, entends la prévenir.
Une certitude : l’humanité disparaîtra.
Une inconnue : dans combien de temps ?
Cette disparition ne fera pas frissonner l’univers et aucun dieu ne sortira des galaxies pour sauver les hommes lors de la chute finale.
C’est que rien n’est éternel, pas même l’univers qui, ayant un commencement, aura nécessairement une fin.
Quant au système solaire, sa mort est annoncée dans cinq milliards d’années, précédée d’une agonie qui verra la Terre englobée dans la sphère de l’étoile, environ dans trois milliards d’années.
D’ici là, l’espèce humaine sera éteinte et les éventuels survivants se réjouiront : « Bon débarras » !
Individuellement, l’humain qui ne peut regarder sa propre finitude en face s’invente des mythes salvateurs. Il ne conçoit pas davantage l’extinction de son espèce élue, tellement exceptionnelle qu’il lui apparaît impensable que survienne un tel effondrement.
L’orgueil humain tient lieu ici d’antidépresseur qui masque la banalité des faits.
La disparition de cette espèce ne perturbera pas plus que celle d’autres espèces, la marche de l’espace/temps et cette disparition n’attendra pas l’épuisement de l’étoile locale.
C’est que le processus d’hominisation est insuffisamment avancé pour pallier aux défis que l’homme pose à la viabilité de la Terre.
Cruel et cupide, l’humain possède une maîtrise utile dont il fait un bien mauvais usage.
La maîtrise est utile depuis que le feu réchauffe les maisons, que la chimie fournit des molécules qui soignent, que l’énergie démultiplie la force animale de l’homme grâce à la machine.
Mauvais usages, lorsque l’homme édifie des bûchers, élabore des poisons, use de sa puissance mécanique pour nuire et exploiter, détruire les sites naturels et tuer la vie.
Chasse, pesticides, béton, bitume et corruptions révèlent la nocivité de l’homme non pleinement hominisé.
Or, la planète en ses éléments physico-chimiques et biologiques étroitement impliqués constitue un système que la science qualifie d’aléatoire et chaotique.
L’homme agit sur ces paramètres dans la seule considération de sa cupidité insatiable et de ses pulsions destructrices.
Prenons un exemple : la modernité voit le triomphe de l’économie dite de Marché, reposant sur ces cellules de base que sont les « entreprises », petites ou gigantesques.
Or, une entreprise ne vise à créer ni bien-être collectif, ni emplois, ni amélioration de la viabilité générale.
Son oxygène, sa seule raison d’être s’appelle le profit.
Sans profit, une entreprise meurt.
Pour obtenir cet oxygène, elle ne peut qu’exploiter les ressources disponibles et l’énergie du travail humain ou celui des machines.
Elle ne crée des biens et remplit des services que dans la mesure où cela génère du profit qui représente sa raison d’être.
Tout frein au profit, tout droit social, tout droit environnemental ne sont que des entraves à cette quête du profit.
Alors, les chambres de commerce et d’industrie, les lobbies corporatistes et les élus oeuvrent à la « libération » des forces vives et la Nature se meurt.
D’où viendra l’effondrement ?
D’une altération catastrophique du climat ?
De la mort de la biodiversité ?
De l’empoisonnement irrémédiable des eaux et des aliments par les polluants perpétuels ?
De l’artificialisation infinie sur un espace fini ?
Parce que mathématiquement, la biosphère constitue un ensemble chaotique aléatoire, nulle prévision ne peut être faite sérieusement.
En revanche, ce qui est certain tient au caractère inéluctable de cet effondrement.
L’homme sera victime de ses deux principales tares : cruauté et cupidité.
Il ne met pas sa maîtrise au service de la vie.
Chasse, pesticides, béton, bitume et corruptions signent l’échec de l’humanité.
Chaque jour perdu rapproche de la chute et l’écoulement du temps rend moins probable une mutation salvatrice de cette disparition.
Regardez, la guerre faite au loup, les tracés d’autoroutes et de déviations routières, le refus des « normes » protectrices du vivant sont des symptômes qui ne trompent pas.
L’homme est le fléau de la Terre.
Gérard CHAROLLOIS