Je lis, publié par Agir pour la Vie Animale (AVA), qu’un laboratoire dit de « recherches » a obtenu du ministère de l’enseignement, de la recherche et de l’innovation l’autorisation d’expérimenter sur 570 rongeurs les effets d’actes cruels sur le psychisme des animaux.
Objet de l’étude : la dépression et l’impuissance de réagir en présence de traumatismes réitérés.
Les rats seraient, durant deux jours, soumis à des décharges électriques qu’ils ne pourraient pas éviter, puis contraints de nager pendant quinze minutes.
Après quoi, mis à mort et ainsi délivrés de cette torture, leurs cerveaux seraient analysés !
Deux observations objectives s’imposent.
1 : une telle expérimentation revêt une cruauté indéniable.
2 : l’intérêt scientifique est nul.
Par son évidence, le premier point s’énonce sans nécessité de démonstration superflue.
Sachez que le rat est doté d’une remarquable capacité d’appréhension de son environnement. Il est intelligent.
Le second point, en revanche, permet de qualifier les solliciteurs d’une telle expérimentation.
Tout d’abord, constatons que toute science est expérimentale.
Une cause, un effet, voilà toute la science.
En dehors de ce caractère expérimental et reproductif, il n’y a pas de connaissance scientifique, mais de la croyance irrationnelle.
Vous absorbez un anticoagulant puissant : vous mourez d’hémorragie interne.
Vous subissez une fracture vertébrale avec rupture de la moelle spinale : vous perdez la motricité et la sensibilité au-dessous de la lésion.
Gardez-vous de vous soumettre à l’expérimentation correspondante parfaitement superflue !
Que veulent démontrer ces pseudo-scientifiques en torturant des rats ?
Le mécanisme d’apparition d’un état dépressif et de quasi-sidération ?
Cruel et inutile, ce prétexte à fausses recherches mérite un blâme éthique et méthodologique.
Qu’un stress post-traumatique génère un trouble neurologique est une évidence, bien que chaque individu répond, comme il le peut, à l’exposition aux actes de guerre, aux accidents matérielles, aux échecs de la vie, en fonction de ses prédispositions, à l’instar de ce que ses cellules réagissent aux agressions somatiques.
Les individus ne sont pas égaux face aux coups de la vie, pas plus qu’ils ne le sont à la toxicité établie du tabac ou de l’alcool.
Or, les réactions hormonales, les variations des transmetteurs biochimiques des neurones en présence d’agressions fortes ou répétées sont connues.
Ces « chercheurs » devraient réviser leurs cours d’endocrinologie et de neurologie, sur les effets du cortisol, de l’acéthylcoline, du gaba, de la sérotonine et de la dopamine.
La littérature médicale répond amplement à leur curiosité.
Bref, de quoi les occuper quelques heures sans avoir à supplicier des êtres sensibles.
Que la pathologie dépressive comporte un versant psychogène et un versant biologique est certain.
Psychologiquement, la triade de BECK l’énonçait sommairement : « Le monde ne vaut rien. Je suis nul. L’avenir est sombre », telle est la recette d’une bonne dépression profonde et douloureuse, à laquelle je vous invite à ne pas succomber (bien que parfois, devant la contemplation des choses ...) !
Biologiquement : un déficit en sérotonine semble impliqué dans la dépression, d’où les effets thérapeutiques de molécules protectrices de ce médiateur chimique.
Que peuvent bien rechercher nos tortionnaires de rats par leurs expériences horribles ?
A propos : je pense que l’expérimentation scientifique est indispensable et à ce stade, je formulerais volontiers une suggestion utile aux avancées des connaissances.
Soumettons ces « chercheurs » à une expérimentation nullement traumatisante, sans incidence néfaste et sans létalité.
L’IRM expérimentale permet de voir comment « s’éclairent » les zones cérébrales selon les stimuli éprouvés.
Ainsi, les mécanismes cognitifs, les émotions, les sollicitations des noyaux centraux se révèlent à mesure que l’on active telle ou telle fonction.
L’IRM de recherche permet de lire dans le cerveau comme dans un livre ouvert.
Face à des scènes cruelles et horribles, l’homme civilisé éprouve une émotion forte, une indignation salutaire qui se voit.
Face au même spectacle, l’infirme de la conscience n’éprouvera rien .
Ne doutons pas de découvrir chez ces inquiétants expérimentateurs les zones lésées qui les privent de tout sentiment d’empathie envers un être souffrant !
Voilà qui sera plus édifiant et instructif pour la science que l’assouvissement de leur pur sadisme.
Non, je ne condamne pas la démarche expérimentale.
Mais celle-ci doit s’inspirer de deux considérations :
1) le respect de tout être sensible
2) l’utilité avérée de la recherche.
Chaque jour, les progrès de la médecine se fondent sur une démarche expérimentale, lorsqu’on innove dans le traitement des maladies.
Un jour, un humain a dû consommer une amanite phalloïde pour apprendre que ce champignon était vénéneux.
Mais une expérience cruelle et dépourvue d’un intérêt certain, mérite notre réprobation absolue.
Une infection virale, une tumeur, un trouble électrique du cœur, une mélancolie profonde cèdent en présence d’un traitement ou inversement la thérapeutique appliquée s’avère inopérante sur le mal et il faut tester, tâtonner, tirer les enseignements des réussites et des échecs.
Il faut une démarche expérimentale pour obtenir des avancées contre la souffrance et la mort.
Mais il existe encore de pseudo-scientifiques pour ériger la torture en occasion d’expériences !
Honte à ceux qui torturent des êtres sensibles pour justifier leur travail de « chercheurs », enfonceurs de portes ouvertes !
Ils rejoignent dans l’opprobre les chasseurs et les amateurs de spectacles sanguinaires qui, eux aussi, font de la mort une récréation, un jeu, un défouloir.
Rien de bon ne sort du mépris dela vie.
Gérard CHAROLLOIS