Par David Joly - Vice-président de la Convention Vie et Nature
Le 22 novembre dernier, l’hebdomadaire de droite Valeurs actuelles publiait une interview du président de la fédération nationale de chasse, Willy Schraen.
Avant de revenir plus loin sur plusieurs mensonges et idioties dont il est coutumier du fait à chaque sortie médiatique, retenons la conclusion de l’article où le président de la FNC indique la priorité immédiate de cette dernière : lancer des procédures judiciaires afin de stopper les violences verbales et physiques en lien avec le monde de la chasse.
Eh bien là, pour une fois, nous sommes bien contraints, par souci d’honnêteté intellectuelle, de reconnaître que Willy Schraen a dit quelque chose de sensé. Il y a bien un réel problème de violence, à tous les niveaux, avec le monde de la chasse.
Mais le bon sens du sieur Schraen disparaît aussi vite qu’il est apparu, parce que pour lui, cette violence, on la retrouve dans les déclarations ou initiatives de personnalités telles que Brigitte Bardot ou Rémi Gaillard, ou encore de structures associatives.
Rendez-vous compte : tous ces gens ont l’outrecuidance de demander l’abolition de la chasse à courre, la mise en place d’un jour sans chasse afin de permettre à tout individu de pouvoir se promener dans la nature sans risquer sa vie, des contrôles d’alcoolémie des chasseurs inexistants à ce jour, l’interdiction de chasser des espèces clairement identifiées en danger d’extinction par des organismes scientifiques indépendants, etc.
Un niveau de violence jamais inégalé dans l’histoire de notre pays !
Alors que le monde de la chasse n'est qu'apaisement. Pour s'en convaincre, il suffit de consulter, ici ou là, les articles des médias qui rapportent ces derniers mois toutes les manifestations d'amour, de compassion et d'empathie issues de l’activité cynégétique.
Violences physiques
- le 26 février 2019, un conducteur du Gers se faisait pulvériser le pare-brise arrière de son véhicule par le tir d’un chasseur, véhicule où se trouvaient 3 enfants à bord. Ce qui n’a à aucun moment ému l’auteur du tir qui a poursuivi son activité comme si de rien n’était ;
- le 1er août 2019, Sud-Ouest nous apprenait que 5 pratiquants de la chasse à courre ont été condamnés à Rennes à des peines de prison avec sursis pour faits de violence envers des militants. L’un des chasseurs a notamment plongé à plusieurs reprises la tête d’une militante anti-chasse dans une douve remplie d’eau. Face à ce qui s’appelle ni plus ni moins qu’une tentative d’homicide par noyade, les 5 prévenus n’ont eu de cesse de minimiser leurs actes tout au long de l’audience ;
- le même quotidien indiquait le 1er juillet 2019 qu’un chasseur savoyard a été condamné pour avoir abattu 4 ânes, l’un après l’autre, à faible distance, en rechargeant sa carabine à chaque fois. Argument de défense de l’ultra-presbyte ou ultra-déséquilibré mental (ou les deux à la fois) : il avait confondu les ânes avec des biches ;
- le 19 septembre 2019, la Voix du Nord faisait état de l’agression physique d’un couple et de leur fille, au sein de leur propre domicile, par trois chasseurs. Ce qui a généré cette descente punitive au sein d’une propriété privée ? Le simple fait que les riverains lynchés ne supportaient plus les nuées de plomb qui s’abattaient dans leur cour et qu’ils en avaient averti les services de police ;
- le 16 novembre 2019, 20 minutes rapportait qu’en Charente-Maritime un cueilleur de champignons avait été abattu par un chasseur, ce dernier ayant été motivé à tirer par les aboiements de son chien, ce malgré le fait qu’il ne voyait absolument pas sa cible ;
- BFMTV a recensé le 27 novembre dernier le nombre d’homicides cynégétiques : 8 depuis le début de l’actuelle saison de chasse, soit déjà plus en l’espace de 3 mois que sur toute la saison précédente.
Cette liste est très loin d’être exhaustive. Il est d’ailleurs impossible d’en réaliser une, tant ce genre d’incidents est monnaie courante. Mais cet échantillon est amplement suffisant pour mettre en lumière la violence physique que Monsieur Schraen dénonce.
Violences verbales
Là aussi l’on pourrait dressait une liste interminable, tant les insultes et menaces de morts à peine voilées envers militants, promeneurs et usagers sportifs de la nature font partie de l’ADN du monde cynégétique.
Mais quoi de mieux, pour illustrer ce volet, que de reprendre ni plus ni moins les propos du patron de la FNC au sein-même de l’interview de Valeurs actuelles.
Car on a là le plus bel exemple de ce que peut être la violence verbale des amateurs de la mort-loisir.
Ici, les insultes, quolibets et vulgarités traditionnels ne sont à aucun moment usités.
Mais lorsque des mensonges et loufoqueries sont mis en avant pour tenter d’innocenter un équipage de chasse à courre d’un potentiel crime, c’est bel et bien une violence verbale abominable qui est pratiquée non seulement envers la mémoire de la défunte victime, mais également envers ses proches.
Valeurs actuelles ne pouvait réaliser cette interview sans évoquer la mort tant tragique qu’épouvantable d’Elisa Pilarski, cette jeune femme retrouvée récemment morte en forêt de Retz, dévorée par des chiens.
Il suffisait à Willy Schraen de faire alors preuve de bon sens et d’un minimum de dignité pour simplement indiquer qu’une enquête était en cours afin de déterminer si lesdits chiens étaient ceux des veneurs présents au même moment sur le même lieu, et qu’à ce stade personne ne pouvait se prononcer.
Cela, c’est à la portée de tout le monde, mais pas à celle de Willy Schraen.
Il commence donc par dire que les chiens de chasse à courre ne dévorent jamais le cerf qu’ils chassent.
C’est bien connu, l’épisode de la curée en vénerie relève de la plus pure science-fiction.
Les photos qui se trouvent ci-dessous sont très certainement des montages. Tout comme les nombreuses vidéos que l’on peut trouver sur le Net lorsque l’on tape le terme de curée dans n’importe quel moteur de recherche.
Photos : Picardie Populaire
Ensuite, Willy Schraen balaye d’un revers de la main l’enquête en cours en expliquant que les chiens de chasse à courre suspectés n’étaient pas présents dans la forêt au moment des faits et qu’ils ont tous été vérifiés par le vétérinaire.
Entendant par-là que le compagnon de la victime, qui s’est rendu sur les lieux du drame après un appel à l’aide de sa conjointe, a menti en indiquant avoir croisé une trentaine de chiens au sein de la forêt.
Des chiens vérifiés par le vétérinaire. Que doit-on comprendre par cette expression : le vétérinaire ?
Le vétérinaire habituel de la meute examinée ? Son impartialité est d’office à exclure.
Un vétérinaire diligenté par la gendarmerie locale ? Il est alors de bon ton de préciser que le lieutenant-colonel Jean-Charles Metras, numéro un des gendarmes axonais et adepte de la mort-loisir, faisait partie de l’équipage de vénerie ce jour-là. Là encore le doute est permis, à tel point que la gendarmerie a été dessaisie de l’affaire par le procureur de la République afin de la confier à un service de police.
Et cerise sur le gâteau : lorsque la journaliste demande à Willy Schraen comment expliquer le décès de la victime autrement que par la piste des chiens de la meute, celui-ci n’hésite pas une seconde. Il faut regarder du côté du loup qui a fait son retour en France.
Et là, Willy Schraen est d’une indécence inégalable. Car il sait pertinemment qu’un loup isolé (si tant est qu’il y en aurait un dans cette région, ce qui reste à démontrer) n’aurait pu infliger à lui seul les morsures relevées sur Elisa Pilarski. À moins de la présence d’une meute, ce qui relève du plus pur fantasme.
Willy Schraen le sait mais peu importe, l’essentiel n’est à aucun moment le respect de la défunte mais la propagande cynégétique.
En termes de violence verbale, Willy Schraen est le maître incontesté.
Le monde de la chasse ne pouvait rêver meilleur représentant.
DJ.