A l’instar de ce que fut la pensée socialiste au 19ème siècle, éclatée entre PROUDHON, FOURIER, MARX, BAKOUNINE, GUEDE et JAURES, la pensée écologiste se révèle plurielle, sans qu’il faille déplorer ce foisonnement.
C’est le propre de toutes les idées neuves, celles qui ont à relever les défis du temps qui les vit naître.
Au 18ème siècle, le défi européen portait sur l’émancipation contre l’obscurantisme, la révolte contre la soumission aux pouvoirs absolus des rois et des cléricaux, l’accession à la raison comme mode d’appréhension du monde.
Au 19ème siècle, la question sociale, l’exploitation frénétique des hommes par une poignée de maîtres de forges et autres « esclavagistes » de l’industrie, des mines et de la finance, sollicitèrent l’ardeur des esprits généreux et éclairés du temps.
Aujourd’hui, la liberté de pensée et de mode de vie, la résistance à l’oppression capitaliste ou plus exactement de « l’économie libérale » demeurent d’actualité et le resteront longtemps, l’humain conservant toujours une propension funeste à l’obscurantisme, comme le prouve l’assassinat de nos amis de CHARLIE HEBDO, et à la cupidité au détriment d’autrui.
Mais, deux défis nouveaux apparurent avec le dernier demi-siècle.
D’une part, la nature est en crise et menace l’homme, non pas par sa luxuriance, son abondance, sa concurrence inter-spécifique, mais par sa mort, imputable à l’humain.
D’autre part, les conquêtes actuelles et plus encore futures de nos connaissances appellent une radicale transformation de notre rapport à la vie et à la mort collective et individuelle.
L’écologie relève ces défis, alors que les vieilles idéologies ignorent ces faits qui n’existaient pas au jour de leur conception.
Dans nos chroniques, amis lecteurs, je reviendrai sur le second de ces défis qui débouche sur une perspective inédite, impensable pour nos prédécesseurs, mais dont nos immédiats successeurs auront à connaître, à savoir : la maîtrise biologique transformant radicalement l’angoisse de la finitude et du vieillissement, cette mort par morceaux.
Etre écologiste, c’est faire le choix de la vie.
Bien sûr, il y a des humains thanatophiles. Ne les privons pas de s’appliquer à eux-mêmes leurs goûts morbides de la destruction.
En revanche, exigeons qu’ils laissent vivre les autres.
Le loisir chasse, de nos jours et dans nos pays, n’est qu’une célébration de thanatos. Des hommes tuent pour se distraire, non pas par dévouement, pour réguler telle ou telle espèce, mais simplement pour tromper l’ennui de leurs dimanches, pour déférer à leur « culture », pour jouir de la prérogative d’ôter la vie à un être sensible qui ne leur a rien fait de mal.
Comme ils sont naïfs ou de bien mauvaise foi, ces écologistes, d’une autre obédience, qui pensent que la chasse est une expression naturelle et que, somme toute, le loup, le lion, le tigre, le renard s’adonnent à la même activité que les fusillots en 4X4.
Oui, la nature possède des prédateurs, donc des proies et, en fait, toute vie, y compris celle d’un végétal, se nourrit d’une mort.
Mais, l’homme s’est rendu possesseur et maître de la nature.
Il ne peut plus se comporter en prédateur exterminateur.
Sa maîtrise appelle une élévation de sa conscience, sa technologie exige une empathie, son pouvoir absolu une retenue, sa domination sur le monde un immense respect de tous les êtres.
La chasse loisir est la négation de ces impératifs éthiques.
Aussi, par-delà les considérations purement matérielles, portant sur la perte de biodiversité et le rôle premier de la chasse dans l’anéantissement des espèces animales, il y a la question morale.
L’espèce qui n’avait pas d’ailes pour voler mais qui inventa l’avion et la fusée, qui ne pouvait vivre sous l’eau, mais qui conçut le sous-marin, qui avait une faible dentition, mais qui inventa le feu, qui était plutôt chétive pour concurrencer à la course, au saut, à la puissance musculaire tout ce qui vit sur terre, mais qui édifia une société technique sans cesse en expansion, ne doit plus détruire, saccager, maltraiter, mépriser la vie.
Le temps est venu, avec la maîtrise, d’une réconciliation excluant la violence, la cruauté, la négation des individus d’autres espèces.
Le lobby chasse Français érige l’imposture en système.
Dans l’ombre, par ses interventions auprès des pouvoirs publics, il n’a qu’une obsession : ne rien concéder et tuer toujours davantage, sollicitant des dates d’ouverture de la chasse les plus étendues et demandant le classement en « nuisibles » des espèces régulatrices.
Mais, dans le même temps et côté lumière, il revendique une qualité de « gestionnaire avisé de la nature ». Sans lui, il en serait fini des zones humides, des haies et d’une faune qu’il protège (à coups de fusils).
La fédération nationale des chasseurs viendrait de déposer sa candidature pour intégrer l’UICN (UNION INTERNATIONALE DE CONSERVATION DE LA NATURE).
Les ortolans et pinsons piégés à la matole dans les LANDES, les grives et merles à plastron écrasés par les lecques en LOZERE, les tétras, les oiseaux d’eau tirés la nuit, les blaireaux torturés au terrier, les ours pyrénéens et les millions d’oiseaux migrateurs qui disparaissent dans le ciel de France apprécieront cette candidature, hommage du vice à la vertu.
Il y a les critiques superficielles de la chasse qui génère des accidents, trouble les randonnées en campagne, provoque bien des dégâts collatéraux parmi les espèces protégées, empiète sur les propriétés privées.
Mais, l’essentiel est ailleurs.
La chasse représente la négation du principe du respect de la vie. Elle est la rencontre immonde de la mort d’un être sensible et de la jouissance perverse d’un homme, une manifestation de thanatophilie.
Si le lobby chasse avance masqué, simule la « gestion de la faune », usurpe le qualificatif « d’écologiste », nous disons clairement ce que nous sommes. Nous ne dissimulons pas que du seul point de vue éthique, nous souhaitons que les humains se guérissent de leur pulsion de mort et que tous instaurent enfin un lien de bienveillance avec les autres espèces.
Il va de soi que notre pensée, notre éthique, nos convictions, nos aspirations à une compassion universelle peuvent ne pas être partagées par l’unanimité de nos contemporains.
Les idées gagnent trop lentement les cœurs et les esprits, en ce domaine comme en tout autre.
Une opinion contraire à la nôtre doit pouvoir s’exprimer et argumenter, en vertu du principe de liberté de conscience de chacun.
En revanche, je voudrais exprimer mon profond mépris pour ceux qui, sans conviction aucune, font la danse du ventre devant le lobby chasse, parce que dépourvus d’esprit de résistance, ils redoutent son arrogance, son sectarisme, son exigence d’une soumission permanente.
Qu’ils sont pitoyables ces politiciens pleutres qui n’ont aucune opinion sur le sujet, mais s’imaginent obligés de s’incliner devant ce lobby.
Ils n’oseront pas affirmer que transformer un oiseau en cadavre constitue un acte élevé, mais ils iront récitant que « leurs amis les chasseurs gèrent admirablement la nature ».
Enormité du mensonge, bassesse du propos qui édifient sur la qualité de l’auteur.
Le quotidien sud-Ouest fait état d’une démarche du président de la région Aquitaine, dit socialiste, pour accueillir sur sa liste, lors des prochaines élections régionales, le président de la fédérations des chasseurs de GIRONDE.
Voilà un département, où en décembre prochain, pas un écologiste authentique ne votera pour ce président sortant !
Puisque nous, opposants à la chasse, sommes majoritaires, appliquons l’adage : « qui va à la chasse perd les élections ».
Gérard CHAROLLOIS