Le schisme démocratique

Vous contestez un permis de construire dans votre immédiat voisinage, un arrêté préfectoral qui autorise la tuerie d’une espèce animale, un règlement administratif, une déclaration d’utilité publique d’une autoroute.
Vous saisissez le tribunal administratif pour lui soumettre votre contestation.
Un maire, un président de département, de région, un ministre commettent des malversations, des abus de pouvoir, des délits ou des crimes, ils en répondent devant un tribunal judiciaire.
L’article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’homme et des libertés fondamentales prévoit que toute personne doit voir sa cause entendue, dans un délai raisonnable, par une juridiction impartiale.
Tels sont les principes de l’état de droit qu’une idéologie perverse remet en cause actuellement.
Nous assistons à un schisme au sein des sociétés démocratiques aussi discriminant que le schisme religieux dans l’Europe du 15ème siècle.
Pour les démocrates, tenant de l’état de droit, les pouvoirs doivent être séparés pour se limiter, se contrôler, se tempérer, selon l’esprit des lois de MONTESQUIEU : pouvoirs législatif, exécutif, judiciaire.
Emerge, de nos jours, une idéologie « populiste autoritaire » qui nie cette ventilation du pouvoir étatique.
Pour ces « illibéraux », néofascistes, tout pouvoir émane du peuple et la souveraineté du peuple ne saurait comporter de frein, de limite, de tempérament.
Le juge n’a pas le pouvoir, au nom d’un état de droit relativisé, de mettre obstacle à la volonté du peuple.
Si votre maire, votre président de département et a fortiori le chef de l’état décident, nulle autorité juridique dépourvue de toute légitimité na saurait contrarier la volonté de l’élu paré de l’onction du suffrage populaire.
Pour les « illibéraux », un tribunal ne peut pas, contre la volonté du Peuple souverain condamner un élu, annuler ses règlements au nom d’un droit supérieur, des droits de l’homme, des libertés fondamentales d’autrui dès lors que cet autrui se place hors du Peuple souverain en osant contester l’autorité de l’état « illibéral ».
Les extrêmes-droites aux USA et en Europe dans les propos des leaders de cette doctrine, fustigent le pouvoir des juges, les droits de l’hommisme, les cours suprêmes.
Ainsi, j’ai entendu un tel leader français remettre en cause la compétence, pour la France, de la Cour Européenne des droits de l’homme.
Ces tenants du « populisme souverain » s’insurgent contre les tribunaux qui osent condamner les hommes politiques lorsque ceux-ci violent les lois justes bonnes pour les citoyens ordinaires.
Le « trumpisme » est par excellence représentatif de cette idéologie qu’assument en Europe les partis politiques « nationalistes souverainistes ».
En fait, cette invocation du « souverain suprême », au-dessus des principes fondamentaux du droit, n’est que l’annonce d’une dictature.
En effet, aucun parti, aucun élu ne peut se réclamer du Peuple souverain puisqu’il n’est jamais que le représentant d’une majorité relative, fragile, fugace.
Si 40% de citoyens d’un pays accordent au premier tour d’une élection leurs suffrages à un parti, cela ne lui confère nullement le pouvoir de bafouer les droits des tiers, même s’il obtient une majorité de circonstance au second tour des élections.
En démocratie authentique, une minorité d’un jour, majorité du lendemain, peut voir sa cause, ses libertés, ses droits fondamentaux garantis par des juridictions impartiales contre les empiètements de l’état.
Inversement, en régime « National populiste », les « illibéraux », aspirent à la dictature et à la conquête d’un pouvoir qu’ils entendent monopoliser, perpétuer en niant les droits des réfractaires trublions dénoncés comme « révolutionnaires » et « écoterroristes », .
La « souveraineté du peuple » brandie par l’extrême-droite n’est que la dictature du duce et de son parti dès lors qu’ils ont obtenu, par accident de l’Histoire, une majorité de 51% des suffrages, un jour de malheur.
Il n’y a de société fondée sur le droit, respectueuse des libertés, que dans la séparation des pouvoirs.
Ma chronique du jour vise à expliciter ce grand schisme contemporain qui n’a rien d’abstrait mais comporte des incidences très concrètes pour les droits des citoyens, des associations, des syndicats, des partis politiques.

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