Je ne connais ni votre maire, ni votre président de département, ni votre président de région, mais je sais qu’ils aspirent obsessionnellement à faire croître la population locale, à développer l’économie, à désenclaver, c’est-à-dire à bétonner, bitumer, asphalter, artificialiser, donc déménager la Nature.
Or, cette croissance démographique, ce développement spéculatif, ce bétonnage à outrance n’ajoutent ni bien-être, ni bonheur aux habitants.
Souvent même, ce « désenclavement », ce « développement durable » nuisent gravement à la qualité de la vie des riverains.
Votre maire, vote président de collectivité territoriale refusent le « zéro artificialisation nette », car ils veulent offrir à leurs administrés, lorsqu’ils sont leurs amis, des permis de construire et des autorisations d’aménagements commerciaux lucratifs, des travaux publics pas toujours d’intérêt général.
Bien sûr, le zèle d’urbanisation, les permis de construire, les autorisations commerciales seront à géométrie variable et malheur à ceux qui déplaisent ou contrarient les ambitions des détenteurs des pouvoirs locaux.
Le conformisme de la croissance infinie dans un espace nécessairement fini va de pair avec une bonne dose de népotisme, de favoritisme et d’échanges de bons procédés.
Méfiez-vous de la « décentralisation », c'est un piège !
D’aucuns ont cru, un temps, qu’il était démocratique de rapprocher le pouvoir du citoyen et qu’il fallait permettre au titulaire d’un fief électoral de décider seul et sans contrôle de ce qui était bon pour son petit coin de Terre, sans les entraves du pouvoir central paralysant et lointain.
Naïveté qui ignore que l’humain se détermine bien souvent par intérêts, par passions, par sympathies et faiblesses, par souci de plaire, et parfois par hostilité envers un contradicteur, un gêneur, un réfractaire opposant.
Non, je n’insinue nullement que les élus locaux sont des voyous mafieux mettant en coupe réglée leurs cantons et uniquement préoccupés de favoriser leurs « gendres ».
Beaucoup sont des gens honnêtes et même parfois dévoués.
Mais ce sont des humains avec leur subjectivité, leurs sentiments, leurs passions.
Méfions-nous de tout pouvoir, car tout homme tend inexorablement à en abuser.
Plus le pouvoir est proche, plus il peut devenir arbitraire, dicté par des considérations subjectives, partisanes, personnelles.
Plus le pouvoir est lointain, plus il a des chances d’être impartial, dégagé des partis pris, des amitiés ou inimitiés.
La distance change tout sous l’angle de l’impartialité sans affecter la démocratie.
Soyons concrets.
Tel propriétaire foncier rêve de gagner, en une signature chez un notaire, plus d’argent qu’il n’en gagnerait en dix ans de labeur ?
Il voudra que son lopin de terre devienne le plus densément constructible, sans considération pour les arbres, la faune, l’espace vide de béton.
Il sollicitera son maire qui aura le souci de gratifier son fidèle électeur.
Tel maire souhaitera que le département finance sa salle des fêtes ou sa piscine municipale et sollicitera le concours financier de son président de département qui, en retour, attendra de l’élu local un soutien fervent pour sa déviation routière ou un vote favorable aux élections sénatoriales.
Vous comprenez que ce petit monde politique souhaite le maximum de pouvoirs décentralisés et le minimum de contrôle sur ses choix qui, par inclinaison, se révèlent toujours contre nature.
La biodiversité ne vote pas, ne subventionne pas, n’intrigue pas, ne renvoie pas « l’ascenseur ».
Créer une réserve naturelle ou rendre inconstructible un secteur foncier n’apportent ni suffrage, ni avantages divers en remerciements des petits services rendus.
Voilà pourquoi la plupart des élus locaux militent pour des lotissements, des zones artisanales, des routes et des ronds-points que des humoristes appelèrent des « pots de vin ».
Préférons un pouvoir impartial, contrôlé, limité, compétent et oublieux des petits intérêts privés : privés de quoi ? De scrupules.
La décentralisation est pour la Nature une arme de destruction massive.
Excusez cette opinion iconoclaste et bien peu conformiste.
Les faits, toujours les faits !
Gérard CHAROLLOIS