André Viard : plus inculte tu meurs !


par Jean-Paul RICHIER - psychiatre, praticien hospitalier, coordinateur du collectif PROTEC

Adhérent de la Convention Vie et Nature

 

Le discours officiel prononcé par André Viard à l'occasion du Toro de la Vega, ainsi que l'article où il annonçait sa présence, nous donnent l'occasion de mesurer une fois de plus l'étendue de son inculture.

 

I - Intro

Le Toro de la Vega est une tradition de la ville de Tordesillas, en Espagne, où chaque année en septembre un taureau est lâché dans les rues de la ville, puis poursuivi par une foule armée de lances, à pied ou à cheval, jusque dans la plaine (la vega), où il est achevé, à la lance puis à coups de poignard dans la nuque.

Cette pratique fait l'objet d'une telle contestation en Espagne que la mairie de Tordesillas a dû faire appel cette année à un intervenant étranger pour prononcer le "pregón", c'est-à-dire le discours d'ouverture des fêtes patronales.

Il s'agit d'André Viard, président depuis 2008 de l'association française de lobbying tauromachique intitulée Observatoire National des Cultures Taurines.

Ce choix discrédite encore plus - s'il en était besoin - le Toro de la Vega. En effet, André Viard est de notoriété publique un personnage dont le fonctionnement affectif est caractérisé par la haine et l'injure, dont la façon d'agir est caractérisée par les manipulations frauduleuses, les manœuvres dissimulées, les mensonges éhontés, et la volonté inépuisable de censurer ses opposants, et dont le fonds intellectuel est caractérisé par l'inculture abyssale.

Ces affirmations sont si précisément documentées qu'elles n'ont jamais été contredites ni par lui-même, pourtant si prompt à menacer ses contradicteurs des foudres de la justice, ni par aucun autre militant pro-corrida, y compris même au sein du conseil d'administration de son organisation.

 

 

Lorsque les opposants à la corrida se félicitent que la défense de celle-ci soit confiée en France à Viard, ce n'est pas une simple figure de rhétorique, c'est une réalité. Viard dézingue la cause qu'il prétend défendre avec un tel talent que les opposants à la corrida en viendraient presque à se dire "Eh, oh, à quoi on sert, nous, alors !?!"

On peut lire ici la transcription du "pregón", du discours d'ouverture, de Viard. C'est en espagnol, mais l'essentiel de ce discours était sur son blog Terres taurines dès le 20 août. Nous nous référerons en premier lieu à cette version française, complétée si besoin de la version espagnole.

 

II - Commençons d'abord par deux figures qui relèvent de la manipulation et du sophisme banaux

1 - La manipulation routinière en matière d'archéologie

Citation : "[…] premier héros de l'humanité peint sur les paroies de la grotte de Villars, lequel était un chasseur à pied qui provoquait la charge du toro pour le tuer de face."

Passons sur la graphie "toro", plus saugrenue que jamais dans le cadre de considérations ayant trait au Paléolithique.

Viard avait récemment élucubré en reprenant les divagations tauromachiques d'un nommé Georges Charrière, lequel dans un article de 1968 (La scène du puits de Lascaux) disait (p 10) que dans la grotte de Villars (Dordogne), l'homme face au bison a "une allure de matador" (p 10). Il n'en faut pas plus à Viard pour en conclure que la corrida remonte à 23 000 ans (chiffre retenu dans son pregón, son discours d'ouverture des fêtes de Tordesillas). Signalons en passant que Georges Charrière s'aventurait dans des domaines que manifestement il ne maîtrisait pas, puisqu'il écrit dans cet article des non-sens éthologiques du genre "la tauromachie est basée sur 'le réflexe de suite' ", c'est-à-dire "le fait pour le bisonneau de suivre automatiquement le premier objet animé, quel qu'il soit, comme si c'était sa mère". Fadjen se précipite sur Christophe Thomas dès qu'il le voit, pour essayer de l'encorner, c'est bien connu.

Et notons que l'un des deux livres qu'a publié cet auteur (La signification des représentations érotiques dans les arts sauvages et préhistoriques, 1970) avait fait l'objet d'une recension par Annette Laming-Emperaire (laquelle a cosigné en 1965 La préhistoire avec André Leroi-Gourhan, excusez du peu). Celle-ci y descendait en flamme le livre, jugé superficiel, confus et incompréhensible.

Juste pour le fun, mentionnons que l'autre livre publié par Charrière est L'art barbare Scythe (1971), histoire de rappeler que les Scythes ont écrasé les Cimmériens, et que l'icône populaire de ces derniers est Conan le Barbare. Tout ça pour dire que la contrepèterie de Conan le Barbare est trop bien illustrée par André Viard (oui, je l'ai déjà faite, mais je ne m'en lasse pas).

 

 

2 - Le plus routinier des sophismes

Citation : "Et tandis que les mouvements animalistes hurlent à la barbarie, des enfants innocents sont massacrés en divers points du globe, sans que les démocraties modernes ne fassent rien pour l'empêcher"

Inlassable argument des tauromaniaques.
Francis Wolff, le philosophe de service du microcosme taurin, commençait un article de 2007 intitulé "Gare à l’idéologie 'animaliste' " en posant la question "Faut-il interdire la corrida ?", et enchaînait "Vous ne savez plus quoi faire de votre pitié ? Vous êtes las de la Tchétchénie, de l’Irak, du Darfour ? Les enfants qui crèvent de faim ou meurent sous les bombes, le soir à la télévision, finissent par vous laisser froids ? "

Un jeune philosophe, Julien Dutant, y avait répondu par deux contre-arguments suffisants :

- en pointant le "sophisme du pire" (le sophisme le plus utilisé par les tauromaniaques) : "il y a pire que la corrida, donc la corrida n'est pas un mal."

- en pointant le caractère "auto-destructif" du procédé, "puisqu'on pourrait dire la même chose de ceux qui luttent contre ceux qui luttent contre l'interdiction des corridas."

Ce dernier contre-argument est redoutable pour Viard. L'a-t-on vu une seule fois dans sa vie lutter concrètement pour l'accès à l'éducation, pour l'accès à la santé, pour l'accès à la démocratie ? Non : son engagement unique est de lutter pour la corrida, pour la corrida, et pour la corrida. L'a-t-on vu une seule fois dans sa vie lutter concrètement contre les hommes politiques corrompus, contre les oligarques totalitaires, contre les extrémistes de tout bord ? Non : son engagement unique est de lutter contre les opposants à la corrida, contre les opposants à la corrida, et contre les opposants à la corrida.

Un autre intellectuel de talent avait démonté à plusieurs reprises les sophismes de M Wolff : il s'agit bien sûr de Jean-Baptiste Jeangène-Vilmer. Et c'est également à lui qu'on peut faire référence lorsque Viard verse ses larmes de crocodile sur "les enfants innocents massacrés en divers points du globe, sans que les démocraties modernes ne fassent rien pour l'empêcher." Car JBJV n'est pas seulement spécialiste de l'éthique animale, il est également spécialiste de l'éthique des interventions armées et du droit humanitaire. Superviard va-t-il, entre deux taurodomontades, nouer sa cape autour du cou et s'envoler vers le Proche-Orient pour y rétablir la paix en deux temps trois mouvements ? Je lui conseillerais auparavant de lire les 500 pages extrêmement éclairantes de La guerre au nom de l’humanité (2012).

En fait, Viard détient la solution, il l'expose dans son pregón : "Le taureau est choyé tout au long de sa vie, et quand arrive l'heure de le tuer, c'est fait avec dignité, en lui octroyant le privilège de combattre pour sa vie et la possibilité de la sauver par sa bravoure, tant dans l'arène que dans la Vega. Combien d'humains dans le monde bénéficient des mêmes droits ? Et que fait le PACMA [le parti de défense animale] pour eux ? Ont-ils protesté contre le massacre des enfants palestiniens ou des chrétiens en Irak ?"

Je vous jure que c'est la traduction mot à mot, sans trucage, sans coupure, vous pouvez vérifier.

Viard propose donc enfin le remède aux conflits qui bouleversent le Proche-Orient : pour que tout aille bien, il suffirait que Tsahal estoque les mouflets de Gaza dans des arènes, et que les djihadistes de l'État Islamique poursuivent les Yazidis à la lance puis les achèvent à la puntilla.

 

III - Passons maintenant au plus amusant : l'inculture de Dédé

Pour ce qui est du Toro de la Vega proprement dit, il récite ce qui est écrit sur le site du tourisme de Tordesillas.

Pour le reste, l'inculture de ce personnage prête à sourire.

 

1 - L'inculture du Président des Cultures Taurines en matière de langue française

Elle est bien connue de tous. On notera ainsi dans cet article ses difficultés :

. dans l'emploi des prépositions ("les civilisations de pourtour méditerranéen", "la barbarie qui consiste en vouloir")

. dans l'accord ("sentiment d'appartenance qu'éprouve ses habitants")

. dans l'orthographe ("les paroies de la grotte", "dilluer leur identité", "l'intransigence est la seule arme")

 

Mais, plus gênant, c'est la méconnaissance du sens des mots.

Dans son pregón, comme à l'habitude, Viard consacre entre le tiers et la moitié de son discours à vitupérer contre les opposants, en l'occurrence le PACMA (Partido Animalista Contra el Maltrato Animal). L'existence d'un parti politique dédié aux animaux en Espagne est d'autant plus compréhensible que ce pays a été le lieu d'une tradition de cruautés festives envers les animaux particulièrement tenace (et qui persiste avec la corrida).

Bon, Dédé nous réchauffe son étroit répertoire lexical : "intégrisme", "fanatisme", "barbarie", "terrorisme", "totalitarisme"…

Le terme "intégriste" revient au moins trois fois dans son pregón. Rappelons que dans un éditaurial fin août, toujours fin et mesuré, Viard comparaît le président du CRAC au chef de Boko Haram au Nigéria.

Viard ne connaît guère le sens des mots. Le terme "intégriste" désigne avant tout les fondamentalistes religieux (initialement les catholiques), qui défendent l'intégrité de la foi, de la doctrine et de la tradition, contre le modernisme et le progressisme. Et il provient même de l'espagnol "integrista" : le Partido Integrista, autre nom du Partido Católico Nacional, voulait la subordination de l'État à l'Église.

Donc, si le terme "intégriste" s'applique à une des parties, c'est d'évidence aux fanatiques de la corrida dont Viard est le porte-parole : ils défendent la tradition, qui doit indéfiniment perdurer au travers des changements sociaux, scientifiques et éthiques, alors que leurs adversaires défendent une évolution des pratiques et des mentalités.

Bref, Viard devrait en toute logique revendiquer son intégrisme avec fierté.

 

Tordesillas, septembre 2014

2 - Inculture du Président des Cultures Taurines en matière des positions des défenseurs des animaux

Bon, admettons que sur ce point il a des excuses.

Citation :"Si cette chasse à risque était réalisée par des indiens d'Amazonie ou des bochimans australiens, les mêmes vegans progressistes qui veulent en finir avec le Tournoi lanceraient des pétitions pour défendre le droit de ces peuples primitifs à pouvoir pérenniser leur culture contre les effets dévastateurs de la globalisation."

Pour le coup, on pourra se féliciter de cette ignorance. La méconnaissance de ses adversaires est pour beaucoup dans l'inefficacité de Viard.

En effet, toujours aussi bien informé, il ignore que si les vilains fanatiques animalistes dénoncent le Toro de la Vega, ils dénoncent pareillement le Ukweshwana, tradition zouloue en Afrique du Sud, comparable en ce sens qu'il s'agit également de la mise à mort annuelle d'un taureau au terme d'une cruelle agonie, au prétexte de célébrer les valeurs guerrières.

 

3 - Inculture du Président des Cultures Taurines en matière des intellectuels qu'il convoque

Il cite en effet Lévi-Strauss :

"En matière de défense des cultures minoritaires menacées de disparition, Claude Levi Strauss disait que l'intransigence est la seule arme qui vaille pour résister à la barbarie qui consiste en vouloir priver une population de sa culture au seul prétexte qu'on ne la partage pas."

En se référant à Lévi-Strauss, Viard se plante une banderille dans le pied (c'est chez lui une vieille habitude). Il ne semble pas savoir que pour le fameux anthropologue, l'homme se caractérise par son appartenance à la nature avant de s'en différencier par la culture, et la césure radicale entre hommes et autres animaux a ouvert la voie à la césure entre groupes humains.

Ainsi, l'esprit de Rousseau comptait tant pour ce grand intellectuel qu'il lui consacra un discours en 1962, pour le 250ème anniversaire de la naissance du philosophe (repris dans Anthropologie Structurale 2, 1973). On y lit notamment :
« Car n'est ce pas le mythe de la dignité exclusive de la nature humaine, qui a fait essuyer à la nature elle-même une première mutilation, dont devaient inévitablement s'ensuivre d'autres mutilations ?
On a commencé par couper l'homme de la nature, et par le constituer en règne souverain; on a cru ainsi effacer son caractère le plus irrécusable, à savoir qu'il est d'abord un être vivant. Et, en restant aveugle à cette propriété commune, on a donné le champ libre à tous les abus. Jamais mieux qu'au terme des quatre derniers siècles de son histoire, l'homme occidental ne put-il comprendre qu'en s'arrogeant le droit de séparer radicalement l'humanité de l'animalité, en accordant à l'une tout ce qu'il retirait à l'autre, il ouvrait un cycle maudit, et que la même frontière, constamment reculée, servirait à écarter des hommes d'autres hommes, et à revendiquer,au profit de minorités toujours plus restreintes, le privilège d'un humanisme, corrompu aussitôt né pour avoir emprunté à l'amour-propre son principe et sa notion. »

Pour Lévi-Strauss, Jean-Jacques Rousseau a découvert avec l'identification « le seul fondement possible de la morale » : « Loin de s'offrir à l'homme comme un refuge nostalgique, l'identification à toutes les formes de la vie, en commençant par les plus humbles, propose donc à l'humanité d'aujourd'hui, par la voix de Rousseau, le principe de toute sagesse et de toute action collectives. »

On retrouvera notamment ces positions dans la fameuse allocution Race et culture prononcée à l'Unesco en 1971, pour l'inauguration de l'année internationale de la lutte contre le racisme.
Et l'extrait en question de Race et Culture sera repris, pratiquement mot pour mot, dans l'allocution, à nouveau prononcée à l'Unesco, pour le 60e anniversaire de l'organisation en 2005.
Avec des phrases comme :
" le respect que nous souhaitons obtenir de chaque homme envers les cultures différentes de la sienne n’est qu’un cas particulier du respect qu’il devrait ressentir pour toutes les formes de la vie."
ou :
" si l’homme est respectable, c’est d’abord comme être vivant plutôt que comme seigneur et maître de la création, première reconnaissance qui l’eût contraint à faire preuve de respect envers tous les êtres vivants."

Figurez-vous que dans son pregón, son discours d'ouverture, Viard n'hésite pas à clamer : "La Bible dit que Dieu a mis l'homme à la tête de sa Création pour la dominer. De fait, les animaux ignorent la charité, et la seule loi qu'ils respectent est la loi de la jungle. Le fort tue le faible."

Eh oui.

 

4 - Inculture du Président des Cultures Taurines en matière d'histoire du droit

Nous aurions été déçu si Dédé avait oublié de nous servir "les premières lois de protection animale furent approuvées par les Nazis."

a) Les premières lois de protection animales furent votées au Royaume-Uni, avec notamment le Martin's Act, la loi de prévention des traitements cruels et inappropriés du bétail, en 1822, puis la loi sur la cruauté envers les animaux, en 1835. Fait remarquable, ces lois accompagnèrent les discussions sur l'esclavage qui aboutirent à la loi d'abolition de l'esclavage en 1833, et ce sont volontiers les mêmes personnalités qui s'engagèrent pour ces deux combats, à commencer par le célèbre William Wilberforce, qui fut un acteur majeur de ces deux lois, et qui fut membre fondateur à la fois de la Société contre l'esclavage en 1823, et de la Société pour la Prévention de la Cruauté sur les Animaux en 1824 (première organisation de protection animale de l'histoire).

Ceci renvoie évidemment à des personnalités françaises comme Victor Schoelcher, initiateur du décret d'abolition de l'esclavage du 27 avril 1848 et porte-parole de la gauche à l'Assemblée, qui soutint la loi Grammont du 2 juillet 1850 sur les mauvais traitements envers les animaux domestiques, et adhéra à la SPA, fondée en 1845.

Ainsi, les méchants extrémistes fanatiques intégristes britanniques ont mis fin dès les années 1830 à de belles traditions humanistes ancrées dans la culture comme le dog fighting, le cock fighting, le badger-baiting, le donkey-baiting, le bear-baiting, ou le bull-baiting (le terme "baiting" désigne l'attaque, par des chiens, d'animaux comme le blaireau, l'âne, l'ours ou le taureau - le terme "pitbull" vient de cette dernière pratique-).

Bull_running.jpg

Après le Royaume-Uni, le mouvement de défense animale se développa dans toutes les nations occidentales. Dans des pays scandinaves ou germaniques furent votées des législations de protection animale, d'encadrement de l'expérimentation animale, ou d'interdiction de l'abattage "rituel" (la Suisse, avant d'interdire les minarets, avait interdit la shehita dès 1893).

En Allemagne, ce mouvement s'intriqua avec la conception de l'esprit du peuple germain (Volk), lié par le sang, enraciné dans sa terre, qu'il s'exprime sous la forme d'une construction romantique de la nature, ou de l'idéologie agrarienne, avec l'écologie telle que développée par Haeckel (inventeur du terme), et accessoirement avec le courant du végétarisme naturiste.

La législation de protection animale introduite en Allemagne sous le IIIème Reich n'avait donc en soi rien d'exceptionnel. Et elle ne faisait que concrétiser un travail législatif qui remontait à des dizaines d'années, avec notamment le rapport de Von Hippel en 1891.

 

b) La reductio ad hitlerum de la défense animale a connu en France un essor avec le livre de Luc Ferry, "Le nouvel ordre écologique" (août 1992), et ses élucubrations sur les lois de protection animale sous le régime nazi à partir de 1933.

Au début de cette année 1992 était paru un article américain plus raisonnable sur cette question : Arnold Arluke et Boria Sax - Understanding nazi animal protection and the holocaust. Anthrozoös, 1992, vol V, n°1, pp 6-31), qui a suscité de nombreux commentaires (Anthrozoös, 1992, vol V, n° 4, pp 218-219, et 1993, Vol VI, n°2, pp 72-107), puis une réponse de Boria Sax : Holocaust Images and Other Powerful Ambiguities in the Debates on Animal Experimentation : Further Thoughts. 1993, vol 6, n° 2, pp. 108-114).

Les affirmations de Luc Ferry ont suscité une réponse dès 1992 (David Olivier - Luc Ferry ou le rétablissement de l'ordre. Cahiers Antispécistes n°5, décembre 1992), cf plus particulièrement le chapitre « La "zoophilie" et le nazisme ».

Et l'historienne Elisabeth Hardouin-Fugier a remis les pendules à l'heure dans plusieurs publications documentées : le CD Dalloz de juin 2002 sur "L'animal de laboratoire sous le nazisme", son chapitre sur "La protection législative de l'animal sous le nazisme" dans Luc Ferry ou le rétablissement de l'ordre en 2002, son chapitre sur "La protection juridique de l'animal en Allemagne de 1800 à 1933" dans L'Amour des animaux dans le monde germanique en 2006, et son article "La vivisection est supprimée en Allemagne. Recyclage et exploitation d'une désinformation récurrente (1933-2009)" dans le 1er numéro de la Revue Semestrielle de Droit Animalier (juillet 2009, pp 207-214).

La soi-disant sollicitude des nazis envers les animaux ne résiste pas à l'analyse : l'expérimentation animale ne semble pas avoir diminué sous le nazisme, la chasse n'était pas condamnée en tant que telle, sans compter le massacre de 30 000 chevaux en Crimée en mai 1944 afin de ne pas les laisser aux Soviétiques...

D'ailleurs l'un des modes de stigmatisation des Juifs consistait à en faire des sous-hommes bestiaux animés de bas instincts (versus le surhomme aryen détenteur des valeurs suprêmes de la civilisation), et à les traiter de "rats" ou de "singes" : les nazis, comme tout le monde, animalisaient ceux qu'ils voulaient éliminer.

J'aurais envie de conclure avec BE Rollins, universitaire américain (Anthrozoös, 1993, VI, 2, 96) : "En fait, il semble qu'on puisse tirer des conclusions plus facilement et plus précisément sur ceux qui tirent des conclusions de cette association unique dans l'histoire, que sur cette association elle-même."

 

5 - Inculture du Président des Cultures Taurines en matière d'histoire de la domestication animale

Citation : "la chasse au toro sauvage remonte à l'époque de la domestication des équidés, en Anatolie, Assyrie et Égypte", et il précise dans son discours d'ouverture que la domestication du cheval dans ces contrées s'est faite "il y a 8000 ans".

Passons ici aussi sur la graphie "toro", saugrenue dans le cadre de considérations ayant trait au Néolithique.

En fait, la domestication du cheval n'est attestée dans l'ancien Proche Orient que dans la dernière partie du 3ème millénaire avant notre ère (même celle de l'âne n'y remonte qu'au 4ème millénaire avant notre ère).

Viard aurait dû demander conseil à Jean-Pierre Digard, ethnologue tauromaniaque spécialisé dans la domestication, qui a participé à la fiche d'inventaire de la corrida.

 

6 - Inculture du Président des Cultures Taurines en matière éthologique

Citation : "la fauconnerie qui est l'art de faire égorger les colombes par des rapaces."

Les falconidés n'égorgent pas leurs proies, ils brisent si besoin leur colonne cervicale avec le bec, qui est pourvu excroissances dédiées à cette fonction.

 

7 - L'inculture du Président des Cultures Taurines en matière d'ethnologie

 

J'ai gardé le meilleur pour la fin : les "bochimans *australiens*" :-)

Viard fait constamment référence au caractère sacré de la culture des peuples, mais il n'est même pas foutu de situer un peuple sur le bon continent.

Les Bochimans sont les premiers habitants de l'Afrique australe, et résident actuellement dans le désert du Kalahari du Botswana.

Faire 8 000 km à la nage pour rejoindre l'Australie, ç'aurait été un peu longuet.

Ils ont au moins acquis une certaine notoriété grâce au film "Les dieux sont tombés sur la tête".

Mais les dieux ne sont peut-être pas les seuls dans ce cas. J'invite donc à nouveau à l'indulgence envers Dédé, dont les défaillances cognitives pourraient être dues à des chutes répétées sur le cigare, lors des nombreuses volteretas qui l'ont jadis conduit à interrompre prématurément sa vocation de toréador.

J-P R.

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