Le choix de la vie.

Avec la mort de notre ami de combat pour la nature, Rémi FRAISSE, le pays s’interroge.

Le pouvoir délivrerait-il un permis de tuer à ses gendarmes mobiles ?

Depuis plusieurs mois, les forces de l’ordre brutalisent les pacifiques opposants aux corridas et les écologistes qui protègent des sites et, avec eux, l’avenir de la planète.

En revanche, les syndicalistes agricoles peuvent souiller les villes et maltraiter de manière honteuse d’inoffensifs ragondins en toute impunité.

La loi n’étant pas la même pour tous, la force et les menaces primant sur le droit, comment considérer des gouvernants qui bafouent les principes élémentaires d’un Etat de droit ?

Rémi FRAISSE, frappé dans le dos par une grenade offensive, a-t-il été victime d’un homicide involontaire, c’est-à-dire d’un accident, ou de coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner ?

Interdit de se poser la question, pour le gouvernement qui veut tourner la page et négocier un ouvrage à réaliser sur le site de SIVENS.

Il appartient à la justice, au terme d’une enquête impartiale, conduite par des juges indépendants du pouvoir, de qualifier les faits et, pour y parvenir, de les élucider.

Pour nous, Rémi FRAISSE est une victime, pas un martyr, notion que nous récusons par choix éthique.

L’écologie ne veut pas de martyr.

Au siècle passé, les idéologies opposées brandissaient comme des trophées leurs fusillés et cachaient les victimes de leurs régimes respectifs. Les fusillés se muaient en fusilleurs, selon la fortune des armes et de l’Histoire.

Selon le côté où coulait le sang, on le mettait à l’affiche ou on le dissimulait sous le tapis aux noms de la dialectique, des moments de négativités qui préparaient l’émergence de l’homme nouveau et des heures radieuses.

Pour nous, la souffrance, la mort, le sang et les larmes ne sont en rien rédemptrices, occasions de gloire, illustrations étincelantes de l’esprit de sacrifice.

Nous voulons des femmes et des hommes heureux, vivant et non mourant pour des idées.

Il est criminel, quelles que soient les circonstances, qu’en ce pays et en ce temps, un jeune botaniste pacifique soit tué par des gendarmes français qui avaient reçu l’ordre depuis plusieurs semaines de matraquer, de gazer, de dissuader les défenseurs du site de SIVENS.

Le pouvoir redoutait un nouveau « NOTRE DAME DES LANDES » et a voulu faire cesser l’entrave aux travaux du barrage financé par le conseil général du TARN, chantier confié à une société privée présidée par le vice président du conseil général du GERS, société qui fit l’étude d’opportunité de l’ouvrage.

Dans les semaines ayant précédé cette mort, le site vit plusieurs militants blessés par les forces de l’ordre.

Les médias sous contrôle jouent du réflexe « légitimiste ».

Ils cherchent à rallier les conformistes pour lesquels le pouvoir et sa matraque, sa grenade et sa répression fut-elle inique, ont toujours raison.

Ceux-là, dans l’Histoire, applaudissent aux camps, aux exécutions parce que, pour eux, l’ordre prévaut sur la justice.

Le président de la république, après quelques jours de flottement, tint le 6 novembre des propos conformes à la dignité et l’éthique en déclarant inadmissible cet acte et en affirmant que la vérité serait faite.

Les faits confirmeront-ils cette assurance du chef de l’Etat ?

La justice investiguera sur le meurtre de Rémi FRAISSE et serait bien inspirée de le faire, par ailleurs, sur le marché de travaux à l’origine de cette mort.

Les élus locaux impliqués dans cette affaire n’ont pas eu l’élémentaire dignité de reconnaître leur responsabilité morale.

En voulant passer en force, en demandant l’expulsion des « zadistes », en maintenant leur projet contre les manifestants, les décideurs ont créé les conditions ayant privé un jeune homme de sa vie.

En maintenant leur volonté de détruire la zone humide, malgré ce meurtre, ils colorent sombrement la classe politique.

Le sentiment de dignité, toujours subjectif, tel que je le conçois, commandait le retrait de la vie politique de ceux qui s’obstinèrent à détruire la zone naturelle de SIVENS, et qui, bien sûr, n’ont pas voulu cette mort. Néanmoins, sans leur obstination, ce meurtre ne serait pas intervenu.

Or, non seulement les élus locaux ne se remettent pas en cause personnellement, ne démissionnent pas, mais ils perdurent à saccager le site naturel de SIVENS.

Cette affaire révèle le niveau de la classe politique incapable d’intégrer les défis écologiques et de renoncer à des pratiques « traditionnelles ».

Certes, ils déclameront être conscients de la nécessité de préserver la biodiversité, de changer les paradigmes économiques, mais, pas dans leurs cantons et pas maintenant.

Or, on ne peut pas, à la fois, sauver la nature et continuer à tout artificialiser, bétonner, asphalter, exploiter.

La fraction « libérale » de la gauche et la droite de l’argent partagent le mépris des impératifs écologiques. Ces partis politiques exercent globalement la même politique favorable aux lobbies, aux appétis de profits de quelques-uns au détriment de l’intérêt général et en insultant l’avenir.

Les Français n’ont pas besoin, lors des scrutins, de changer les uns par les autres puisque les différences ne sont que de style et non de fond.

Offrons aux citoyens une véritable alternative, d’autres priorités, d’autres valeurs.

La vie et sa qualité priment sur la « croissance », sur les corporatismes, sur les profits.

Une autre démocratie, plus participative, permettrait aux citoyens de se réapproprier les pouvoirs décisionnels qui, pour l’heure, appartiennent aux marchés et aux lobbies.

Seuls, les écologistes portent cette rupture, cette alternative à une politique qui échoue et qui tue, rupture non régressive, exempte de hargne et d’aigreur, fondée sur la réconciliation de la société avec le vivant.


Gérard CHAROLLOIS


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