De l’affaire Martial Mouqueron à l’Affaire Christophe Leprêtre.

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Depuis plusieurs années des associations,  le COMITE RADICALEMENT ANTI-CORRIDA, la FLAC et l'ALLIANCE ANTI CORRIDA notamment, demandent, outre l’abolition de la torture tauromachique, l’interdiction des arènes sanglantes aux mineurs de seize ans.
Le 20 juillet 2012, à MONT DE MARSAN, dans ce département des LANDES qu’une minorité de sinistres individus, mangeurs d’ortolans et tortionnaires de taureaux déshonore, une enfant de six ans a été sexuellement agressée, durant une corrida, dans les arènes, fait non contesté et néanmoins étranger à la tauromachie.
Le 16 octobre 2012, Christophe LEPRETRE, militant anti-corrida, organisa à MONT DE MARSAN, une manifestation publique, évidemment totalement pacifique.
Fait révélateur, les associations pro-tauromachiques mandatèrent un huissier de justice pour constater les propos tenus lors de cette manifestation, ainsi que les banderoles brandies.
Il n’est pas banal de voir des groupements idéologiques envoyer un huissier de justice pour surveiller une manifestation publique et fixer les discours de leurs antagonistes.
L’intention était d’emblée évidente.
Or, rien ne fut relevé de nature, à priori, à satisfaire ladite intention évidente des taurins, à savoir, déceler une infraction quelconque, à imputer à leurs contestataires.
Ils ne trouvèrent que les propos dont je rapporte ici la substance  :
« Une enfant de six ans a été agressée sexuellement aux arènes le 20 juillet dernier.
Ce fait ne serait pas survenu, si ce spectacle était interdit aux mineurs.
Nous demandons au maire d’interdire l’accès des enfants aux spectacles violents que sont les corridas ».
Et voilà, pour les amateurs de torture tauromachique, Madame le maire est diffamée !
Le militant anti-corrida est condamné pénalement sur le fondement juridique de la loi sur la presse du 29 juillet 1881.
La cour de cassation doit être saisie pour un rétablissement du droit et le triomphe du  principe premier, absolu, sacré de la liberté d’expression.
Il n’y aurait diffamation que si notre ami opposé à la torture des taureaux avait imputé au maire l’agression sexuelle de l’enfant de six ans.
Une telle accusation eut été effectivement diffamatoire et surtout complètement stupide, tellement idiote que nul ne peut se tromper sur le sens des propos tenus.
Pour faire condamner le « réfractaire », il fallait feindre qu’il attribuait à l’élue une part d’intervention directe ou indirecte dans le fait déshonorant.
De toute évidence, Madame le maire de la commune de Mont de Marsan n’a rien à voir avec cette agression.
Elle ne l’a ni commise, ni incitée, ni facilitée, car elle ne pouvait pas la prévoir.
Le militant n’a ni affirmé le contraire, ni insinué quoi que ce soit de cet ordre.
En revanche, il est tout aussi évident que l’agression dont nulle autorité publique n’est responsable, n’aurait pas eu lieu, le 20 juillet 2012, dans les arènes  de MONT DE MARSAN, si les pouvoirs publics avaient interdit l’accès de ce spectacle de torture aux enfants, interdiction justement objet des demandes associatives.
Mais, pour les besoins de la cause, à savoir intimider le militant, le faire taire, le lobby taurin doit soutenir, contre toute logique, qu’il attribue au maire un rôle dans la commission d’une infraction à laquelle madame le maire  est étrangère.
Il faut bien que la présence d’un huissier de justice, un après-midi entier, sur une place publique, ait servi à quelque chose !
Alors, ils soutinrent que l’adversaire idéologique avait diffamé l’élu en lui imputant un fait de nature à porter atteinte à son honneur, définition juridique du délit de diffamation.
La dénaturation du fait et du droit est énorme en cette affaire et la cour de cassation devra rappeler les principes fondamentaux en la matière.
Quels sont-ils ?
Deux textes régissent, en droit, la question.

1 - L’article 10 de la CONVENTION EUROPEENNE DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L’HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES protège la liberté d’expression.
Toute atteinte à cette liberté doit être proportionnée, prévue par la loi et imposée par la prise en compte d’intérêts fondamentaux contraires.
Ainsi, il est permis de dire que :
La corrida est un spectacle cruel, dégradant, dangereux pour la sensibilité des enfants, que ce spectacle de mort doit disparaître et qu’il y a urgence à épargner les enfants de la vision d’un herbivore maltraité, perforé, tourmenté jusqu’à la mort.
Cela déplaît aux amateurs de torture ?
Il faut qu’ils acceptent de l’entendre, au nom de la liberté de pensée, d’expression et du pluralisme idéologique.
Nous l’affirmons, le revendiquons et notre opinion participe de l’imprescriptible liberté d’expression.
Oui, le militant pouvait, en droit, expliquer que si les pouvoirs publics avaient interdit l’accès des arènes aux enfants de moins de 16 ans, l’agression de la fillette ne se serait pas produite en ce temps et en ce lieu.
Si l’enfant avait été victime d’un effondrement de gradin ou d’un autre accident quelconque, le raisonnement eut été le même.

2 - La diffamation, des articles 29 et 31 de la loi du 29 juillet 1881, est l’imputation à une personne d’un fait mensonger de nature à porter atteinte à son honneur et à sa réputation.
Quelle imputation mensongère peut-on reprocher au militant Christophe LEPRETRE ?
Il n’a pas dit, ce qui eut été parfaitement illogique, que le maire de la commune fut auteur, co-auteur ou complice d’une agression sexuelle.
Il a dit, autre évidence, que son association demandait l’interdiction de l’accès des arènes aux enfants et que si l’enfant n’avait pas été là, au moment de cette corrida, les faits délictueux n’auraient pas eu lieu.
Qu’y a-t-il de mensonger en cette affaire ?
Où est la diffamation ?
Laissons à la cour de cassation, et à défaut, à la cour européenne des droits de l’homme, le soin de dire le droit.

Je voudrais ici rappeler une autre affaire similaire qui m’incita, dans un éditorial, à intervenir en faveur d’un opposant à la chasse, victime du lobby des tueurs agréés :
Il y a quelques années, le militant anti-chasse, Martial MOUQUERON, participa, dans la région d’AMIENS, à une manifestation contre le loisir de mort.
Il brandissait une banderole énonçant :
« Au pays des assassins, le chasseur fait führer ».
Il fut, dans un premier temps condamné par une cour d’appel, pour diffamation, à l’initiative d’une fédération départementale des chasseurs.
La cour de cassation fut saisie et rappelant le droit, censura cette condamnation.
En droit, de manière qui me semblait assez évidente, une association de chasseurs n’était pas habilitée à poursuivre des propos qui ne la visaient pas personnellement et que, par ailleurs, lesdits propos ne comportaient pas l’énonciation de faits de nature à porter atteinte à l’honneur « du chasseur inconnu ».
La cour de cassation suivit ce raisonnement.
Victime de veneurs, un autre groupe de militants est poursuivi, à VERSAILLES, pour de prétendues violences d’opposants à une chasse à courre.
Il n’est pas exceptionnel de voir les militants de la cause animale devoir aller jusqu’en cassation pour faire triompher le droit et la liberté.
Pourquoi ?
Avant de répondre, constatons qu’en ce pays, les actes de cruauté envers les animaux sont, à quelques exceptions près, punis de peines dérisoires et que ceux qui tuent des ours ou des loups n’ont guère à craindre les tribunaux correctionnels.
C’est que les juristes français ignorent la biologie, l’éthologie, l’écologie et demeurent imprégnés, dans leur majorité, d’une approche anthropocentrique du problème.
Pour des « hommes d’ordre », ceux qui remettent en question le rapport à l’animal sont suspects d’extrémismes.
Trop de tribunaux traitent défavorablement les réfractaires à la cruauté et prêtent ainsi la main aux lobbies, tout en témoignant de pusillanimité envers les délinquants qui exercent des sévices ou détruisent des espèces protégées.
Il existe dans la magistrature, la haute administration, la classe politique un syndrome d’ignorance de ce qu’est le peuple.
Pour ces « élites », le peuple s’amuse à tuer les oiseaux, les ours et les lynx et a besoin de traditions sanguinaires.
Or, c’est confondre le peuple et l’arriération, ce qui revient à le mépriser, par méconnaissance : un récent sondage IFOP révèle que ce sont les ouvriers, les employés, les gens humbles qui sont les plus favorables à la cause animale.
En revanche, les plus hautes juridictions, tenues de dire le droit, remettent souvent les faits à leur place.
Notre CONVENTION VIE ET NATURE sera toujours aux côtés de tout militant qui œuvre pour la vie et la liberté.
Le droit pénal ne saurait devenir un instrument d’intimidation aux mains des lobbies qui, pauvres d’arguments, riches d’argent, intentent des procédures invraisemblables pour dissuader les femmes et hommes de mieux qui les combattent.
Nous ne les laisserons pas faire.

La vie, à l’instar de la liberté, ça se défend !

Gérard CHAROLLOIS