Un réveil de la conscience citoyenne

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En février 2024, dans un contexte électoral des chambres d’agricultures, la FNSEA (à droite) et la Coordination rurale (proche du RN) se livrèrent à des surenchères sur le thème : « non aux normes, non aux contrôles, non à l’écologie punitive ».
Combien furent-ils à manifester pour obtenir plus de pesticides, des méga-bassines, des privilèges face à la population ?
Dix mille selon les renseignements policiers, mais avec de gros tracteurs, force lisier et pneus sur les ronds-points et devant les grilles des préfectures.
Mobilier urbain dégradé, voies publiques souillées, locaux administratifs et associatifs détériorés en toute immunité « syndicale » accompagnèrent ces mobilisations dites agricoles.
La presse relaya la colère de « nos agriculteurs », dans un bucolisme bien éloigné des faits et sollicita le soutien du pays à la grande satisfaction des partis réactionnaires jubilant devant un rejet de « l’écologie punitive ».
L’écologie tient lieu de bouc émissaire à ceux qui, au siècle passé, persécutaient les partageux et les socialistes.
Au parlement, le chef de l’état privé de majorité fit le choix de s’appuyer sur la droite et l’extrême-droite pour gouverner contre une gauche qui risquait de remettre en cause les cadeaux faits au monde de l’argent qui avait fait son élection.
Depuis un an, les régressions se succèdent : abandon des zones à faibles émissions, remise en cause du Zéro Artificialisation Net, abaissement des normes en faveur de la biodiversité et de la santé publique .
La loi DUPLOMB, inspirée par un sénateur LR de HAUTE-LOIRE, participe de cette régression avec autorisation d’un biocide placé sous surveillance par la communauté scientifique, facilités données pour les méga-bassines des irrigants et aux élevages concentrationnaires.
L’obscurantisme, la loi des lobbies, le recul de l’intérêt général semblaient inéluctables dans un contexte international « trumpiste ».
Lancée par une étudiante, une pétition contre la loi DUPLOMB révèle que l’esprit critique et la conscience citoyenne existent encore.
A l’heure où j’écris ces lignes, cette pétition adressée à l’assemblée nationale recueille un million sept cent mille signatures .
Atteindra-t-elle les deux millions ?
Les indigents politiciens conservateurs s’émeuvent.
Ils avaient confondu un groupe de pressions tapageur et violent avec le « peuple » !
Quel est le bilan de l’agriculture contre Nature promue par l’agrobusiness ?
80% des insectes ont disparu, ainsi que 65% des oiseaux de plaine et 80% des paysans.
Oui, ils étaient encore deux millions après guerre et aujourd’hui on dénombre 380.000 exploitations agricoles en France.
Que disent les soutiens de la loi DUPLOMB ?
« Nos agriculteurs souffriraient d’une distorsion de concurrence avec les autres agriculteurs des autres pays Européens autorisés à utiliser les molécules chimiques controversées ».
Très juste, mais il convient, à l’inverse de ce que fait le lobby agricole, d’agir énergiquement à l’échelon fédéral pour que l’Union Européenne interdise dans toute l’union les pesticides dangereux.
Le lobby agricole, à l’échelon européen, ne milite guère pour des normes protectrices de la Nature et de la santé publique.
En fait, en cette affaire, le paysan est instrumentalisé au profit de firmes du poison dont il est victime.
Un agriculteur éclairé militera pour qu’il y ait des normes contrôlées protégeant sa santé, celle de sa famille et la qualité de ses productions.
La norme est ce qui préserve des abus et des fraudes, ce qui garantit les gens honnêtes contre la concurrence des mafieux qui pourraient, en l’absence de norme, écouler sur le marché des aliments frelatés et empoisonnés.
L’opinion l’aurait-elle compris ?
Enfin, un peu d’eau et d’air purs dans une époque régressive.
Merci à l’étudiante à l’origine de ce sursaut.
Bien sûr, les petits commis des firmes et des lobbies veilleront à préserver la loi DUPLOMB contre l’avis majoritaire, mais ce magnifique sursaut prouve que la lucidité n’est pas tout-à-fait éteinte par le vent du « trumpisme » ambiant qui putréfie tout et place la société sous le joug de l’affairisme libéré.