Expérimentation sur l’animal, connaissances et éthique.

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A l’initiative d’associations telles qu’ANTIDOTE EUROPE, STOPVIVISECTION, un million deux cent mille citoyens de l’Union Européenne sollicitèrent la saisine des instances politiques de l’Europe, à l’encontre de l’expérimentation animale.

Je mesure l’immense travail militant qu’exigea ce recueil de plus d’un million de soutiens, seuil à atteindre pour contraindre l’Europe, non pas à opiner en un sens ou un autre, mais à débattre du sujet, objet de la pétition citoyenne.

La Commission Européenne, par décision du 3 juin, vient de rejeter cette résolution citoyenne en réaffirmant qu’il convenait de tendre à un remplacement progressif de l’expérimentation animale dans un souci éthique.

Très opportunément, les initiateurs de la pétition soulignaient qu’outre l’aspect éthique du problème, il y avait lieu de réévaluer la problématique de l’expérimentation sur l’animal à l’aune des résultats scientifiques obtenus.

Dès le 18ème siècle, certains esprits éclairés et généreux, tel le bon curé athée Jean MESLIER (1664 – 1729) s’insurgèrent contre les violences faites aux animaux en soulignant qu’anatomiquement et physiologiquement, ils étaient nos semblables, par la disposition des organes et les étapes de leurs vies.

La connaissance permettait ainsi d’élever la conscience : puisque dans une approche matérialiste, les animaux nous ressemblent, n’est-ce pas là le signe d’une unité profonde du vivant ?

L’époque ignorait la théorie de l’évolution que découvrit le 19ème siècle.

Quant à DARWIN qui affirmait qu’entre l’homme et l’animal existe une différence de degré et non de nature, il ignorait les similitudes génétiques entre les espèces et notamment entre la nôtre et celles des grands singes.

Ainsi, la science étaye la conscience et fait d’un négationniste du droit de l’animal à ne pas être maltraité, un sadique doublé d’un obscurantiste.

La science élève notre capacité d’appréhender le monde et d’en mesurer la vulnérabilité, la richesse, les splendeurs dans la fragilité de la vie.

Sans être la conscience, elle offre à nos réflexions un instrument qui éclaire.

La science, arme contre la maladie, les tourments, la souffrance, la mort, est l’auxiliaire de tous les biophiles qui aspirent à épargner les êtres.

La question, nullement éludée, prise à bras le corps par les militants auteurs de la pétition, est donc de savoir s’il faut choisir entre vivisection et avancée des connaissances, en particulier en biomédecine.

Longtemps les vivisecteurs opposèrent les intérêts de la souris et ceux de l’enfant leucémique, proposant une option faussée.

Faut-il renoncer à utiliser l’animal comme « matériel de laboratoire » au risque de ne pas découvrir une thérapeutique efficace, novatrice, révolutionnaire terrassant une affection cruelle et létale ?

Les avancées de la biomédecine, de la chirurgie ne profitent-ils pas aux humains, mais aussi aux animaux en médecine vétérinaire ?

Or, nous n’en sommes plus à ce stade et pour conquérir une nouvelle frontière thérapeutique point n’est besoin de torturer des êtres sensibles, ni même de passer ses journées à disséquer des cadavres.

Je laisse de côté les pseudo-recherches de quelques pseudo-scientifiques, pervers pathologiques, qui se livrent occasionnellement à des expériences d’une cruauté inouïe sur des êtres sensibles, sans aucune portée utile pour nos connaissances.

Peter SINGER décrivit, dans son livre, LA LIBERATION ANIMALE, ces abominations qui ne relèvent pas de la science, mais du crime contre le vivant.

Parlons de la recherche sérieuse, celle qui vise à l’obtention de médicaments destinés à guérir, celle déchiffrant le processus de vieillissement cellulaire, celle tendant à mettre au point des techniques chirurgicales innovantes.

Pour l’homme et pour l’animal, de telles recherches s’avèrent indispensables pour faire reculer l’enfer de certaines pathologies dont la cruauté ne peut être appréhendée que par celui qui a été confronté par lui-même et souvent par ceux qu’il aime, au mal absolu.

Or, avec nombre de scientifiques, je réponds qu’au stade de nos connaissances, l’expérimentation sur l’animal ne s’impose plus.

La vraie recherche biomoléculaire se fera sur des cellules et des tissus en culture et par simulations.

Bien sûr, il faut parvenir à la phase de validation thérapeutique, mais celle-ci, après précautions d’usages, ne peut intervenir que chez l’humain souffrant, bénéficiaire du protocole nouveau.

Chaque espèce possède son particularisme biologique et ce qui est valable chez l’une ne le sera pas nécessairement chez une autre.

Dans la mesure où un être vivant ne saurait être du « matériel de laboratoire », où tout être sensible capable de souffrir doit être exonéré d’actes cruels, il n’y a plus lieu de tolérer des expérimentations douloureuses et sans utilité pour cet être sensible.

Concilions science et conscience, raison et compassion, responsabilité envers ceux qui souffrent et qui aspirent à la guérison et respect dû à ceux qui, par leur faiblesse, nous sont confiés.

Près de STRASBOURG, une entreprise privée se propose de fournir de grands singes aux laboratoires.

Ce ne sont pas ces « expérimentateurs » d’un autre âge qui découvriront le  « grand secret », la clé qui commande le processus de duplication cellulaire, cette clé qui permettra la maîtrise du cancer et du vieillissement, cette mort par morceaux.

Y aurait-il des scientifiques vivant encore au temps de Claude BERNARD et de sa physiologie expérimentale sanglante, oublieuse du caractère sensible de l’animal ?

Pour la Commission Européenne, le Marché, les affaires, les entreprise, la concurrence, autorisent la poursuite du grand sacrifice des animaux de laboratoire.

Les dirigeants majoritaires, ceux qu’élirent les peuples Européens, ces ordo-libéraux, n’ont rien à faire des progrès de la biomédecine ni de la souffrance des animaux. Ce qui les anime ne tient qu’au profit de la « libre entreprise ».

Amis du vivant, n’attendez rien de bon de ces personnages dogmatiques pour qui l’arbre, l’animal et l’homme ne valent rien au regard de leur dieu : le Marché.


Gérard CHAROLLOIS