1788 ?

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Il y a ceux qui en rêvent, dont je suis : « Sommes-nous en 1788 « ?
Il y a ceux qui savent que tous les rêves ne se réalisent pas et j’en suis.
Nul ne disconviendra que les temps que nous vivons sont ceux de la fin d’une époque : le libéralisme économique, l’anthropocentrisme obscurantiste, le mercantilisme âpre débouchent sur des crises sociales, morales, écologiques qui génèrent, chez les uns, des peurs et, chez d’autres, de justes indignations.
Alors, sommes-nous parvenus, à l’instar de nos « grands ancêtres » de la fin du 18ème siècle, à la veille d’une Révolution nécessaire ?
Où sont les MONTESQUIEU, ROUSSEAU, VOLTAIRE, CONDORCET, DIDEROT qui préparèrent culturellement les esprits à la déclaration des droits de l’homme du 26 août 1789 et à la proclamation de la première république le 20 septembre 1792 ?
A défaut, serions-nous en 1848 ?
Mais quel LAMARTINE vient d’écrire ses GIRONDINS ?
Serions-nous en 1871 ?
Mais où sont les socialistes libertaires qui firent la Commune ?
Pour qu’il y ait une révolution, il faut de l’idée, de l’ardeur généreuse, de la volonté d’améliorer la condition du vivant.
Contrairement aux marxistes classiques, je ne pense pas que l’infrastructure économique commande tout.
Ce sont les idées et non les petits intérêts qui font les grandes choses.
Or, la France de 2013 nous offre le spectacle navrant de tartarinades poujadistes, de colères de « beaufs » soucieux d’échapper à l’impôt, de corporatismes égoïstes de patrons hargneux et d’exploitants agricoles subventionnés et pollueurs.
Sous les « bonnets rouges » et consorts ne germent aucune société nouvelle, aucun amour de l’humanité ou du vivant, aucune aspiration altruiste, aucune utopie féconde.
Rien que de l’aigreur de ligue de contribuables, degré zéro de l’éthique, parfois habillé d’un nationalisme localiste qui vaut ce que vaut tout nationalisme.
Ces forces sociales, hostiles à la taxe poids-lourd et plus généralement à tout changement, furent privilégiées par les trente glorieuses et loin de vouloir une société meilleure, elles souhaitent perpétuer une politique désastreuse dont elles furent bénéficiaires.
Gavées aux subventions et à la croissance au détriment d’autrui et de la nature, les corporatismes agités de ces dernières semaines veulent conserver leurs avantages et non construire une société plus juste, plus responsable.
Face à ce néant de la pensée, l’écologie politique, alternative possible, se saborde dans le carriérisme et le reniement des concepts qui la fondent.
Si culturellement, nous, biocentristes, parvenons à sensibiliser, à gagner les intelligences, (voire les innombrables articles et colloques sur la condition du vivant), il faut constater que sur le terrain politique, les gouvernants perdurent à servir les lobbies thanatophiles et les écologistes politiques n’exigent aucune avancée sur l’essentiel.
Abolir la corrida, la chasse à courre, démanteler les structures vichystes de la chasse Française ne coûterait strictement rien, financièrement parlant,.
Ces points devraient faire l’objet d’une négociation avec les pseudo-socialistes (en fait, centristes, ce qui ne constitue pas une critique, mais un simple constat), actuellement au pouvoir et conditionner une participation à une majorité plurielle.
Or, soucieux de ministères et de fauteuils électifs, les écologistes politiques font silence sur les aspirations profondes de la société, d’où leur marginalisation qui leur fera perdre, demain, leurs fauteuils pour avoir perdu, aujourd’hui, leur raison d’être.
Il ne leur suffit pas de déposer, pour faire plaisir à l’opinion, des propositions de lois d’abolition de la chasse à courre et de la corrida, en sachant qu’elles ne seront jamais débattues.
Il leur faut exiger leur adoption sous peine de rompre l’alliance majoritaire.
Alors, 1788 ?
Pas tout de suite, nous vivons une époque médiocre dans laquelle l’intelligence et le cœur ne sont pas encore à l’ordre du jour.
Mais, ça viendra !
Non pas sous la forme d’un terrorisme purificateur, d’une acceptation d’un mal quelconque temporaire dont sortirait un bien, non pas de violences, d’épurations.
Cela viendra d’une affirmation de la prévalence absolue de la vie et de la liberté.

Gérard CHAROLLOIS.