De la taxe poids-lourd à la Révolution nécessaire.

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A l’instar de son antagoniste soviétique d’hier, le système capitaliste, socialement désastreux, écologiquement criminel, moralement putréfiant, échoue.
Les forces d’argent, dominant la globosphère grâce à leur propagande mensongère, masquent les impasses et la nuisance du « libéralisme économique » pour la nature et pour l’humain.
Face à ce système usé, délétère, corrupteur, il faut une rupture, un changement radical détrônant le dieu Argent pour célébrer l’amour de la vie, substituant aux incitations à la « compétition », à la «concurrence », à « l’esprit d’entreprise » les valeurs de solidarité, de gratuité, d’empathie, d’altruisme, de respect des autres et de soi-même, tout ce que nie le système actuel fondé sur l’écrasement, l’exploitation, la domination brutale.
Bien sûr, le biocentrisme appelle à une révolution sans violence, sans échafaud, sans négation des droits de quiconque.
Le biocentrisme est une Résistance, mais sans épuration, sans arbitraire.
Alors, peut-on discerner dans les agitations actuelles de la société Française l’amorce de cette Révolution salutaire ?
Il n’en est rien.
La grande politique a pour infrastructure l’éthique.
Or, dans les corporatismes exacerbés, il n’y a aucune éthique mais que de la cupidité, de la défense de privilèges.
Ce n’est point du MEDEF et de la FNSEA que sortira la société altruiste, écologique, sociale et libertaire.
Aiguillonnés par les écologistes, les gouvernements des pays européens instaurent, sous une forme ou sous une autre, une fiscalité visant à taxer la pollution.
La démarche s’avère plus symbolique qu’effective.
L’ambition des experts étaient, en France, grâce à la taxe poids-lourd dite écotaxe, de faire passer de 15% à 22% le tonnage  de  marchandises transporté hors route.
Une coalition hétéroclite de patrons du transports routiers, de tenanciers  « d’usines à cochons et à poulets », de militants des ligues de « contribuables », renforcés d’éléments traditionalistes inconsolables du droit reconnu aux homosexuels de se marier, vandalisent et manifestent bruyamment.
Cette agitation ringarde n’annonce pas une rupture du système déprédateur, mais la volonté conservatrice des pollueurs de refuser tout changement.
Ces émeutiers veulent du diesel et du lisier, du productivisme et des rentes de situations acquises au détriment d’autres populations et de leur propre environnement.
La taxe poids lourd est un impôt intelligent et utile.
Actuellement, la Bretagne envoie 750000 malheureux porcs se faire tuer en Allemagne par des Roumains et des Bulgares payés 3 euros de l’heure. La viande revient en France et les agitateurs pleurent sur la fermeture corrélative de leurs abattoirs locaux !
Ils refusent une taxe contre la pollution mais demandent des subventions.
Ils fulminent contre l’Etat et contre l’Europe, tout en demandant la protection de l’Etat et de l’Europe  contre le dumping social.
Ils sont incohérents et mus exclusivement par un corporatisme primaire, égoïste.
On ne fera pas un monde meilleur avec  des ligues de contribuables.
La taxe poids-lourd, mesure opportune en son principe, conçue par des gouvernants dociles aux intérêts privés, méritait un recouvrement public.
Le coût estimé de ce recouvrement est de deux cent millions par an, au profit d’une société privée à laquelle le précédent gouvernement concéda la mission.
Il fallait des investissements publics et créer des emplois publics pour la mise en place et le fonctionnement de l’écotaxe. la somme ci-dessus rappelée permettait largement d’y pourvoir .
Par-delà les arguments de part et d’autre, il convient, prenant de l’altitude, de tirer les enseignements de l’agitation actuelle.
Au lieu de faire front, d’assumer un choix clair, de dénoncer le caractère politiquement réactionnaire des forces mobilisées contre l’impôt, les gouvernants louvoient, cèdent et même « comprennent ».
En fait, soit ils ne comprennent rien à l’affaire, soit ils n’ont pas le courage politique de combattre idéologiquement, de défendre le principe de l’impôt, instrument de la solidarité sociale.
Cela aussi rappelle des pusillanimités des années 1930.
L’évolution des rapports des forces politiques me conduit à penser que la société ne fera pas l’économie de cruelles désillusions.
Les thérapeutes qui se penchent sur ses maux ont prouvé, dans le passé, la nocivité de leurs remèdes.
Sans doute faudra-t-il une nouvelle expérience désastreuse pour  que survienne un sursaut.
N’oublions jamais cette leçon fondamentale :
Les bons sentiments ne suffisent pas pour faire  une bonne politique, mais il est sûr que les mauvais sentiments en feront toujours une calamiteuse.
Or, la peur, la haine, l’égoïsme exacerbé, le mépris des plus humbles préparent une société féroce pour tous.
Ceux qui refusent la taxe poids-lourd, qui brisent des biens publics ne le font pas pour l’arbre, l’animal et l’homme.
Ils le font pour un productivisme intensif cruel pour l’animal, toxique pour les eaux, destructeur de biodiversité.
Ils le font pour une société dont nous ne voulons plus.

Gérard CHAROLLOIS