L’impasse du populisme

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Durant les trente glorieuses de 1945 à 1975, le Système mercantile, productiviste, fondé sur la loi du marché, de la croissance purement quantitative fit illusion.
Il amena l’élévation du niveau de vie, l’amélioration matérielle de l’existence, les progrès relatifs de la science et de la technique sources de bien-être et de guérisons, l’espoir de ce que la condition des hommes de demain serait meilleure que celle des hommes d’hier.
En ces années-là, la réforme était de « gauche ». Elle signifiait augmentation des revenus, garanties et droits nouveaux, performance des services publics, générosité de la puissance publique, protection accrue de l’individu.
Puis survinrent les échecs et impasses de ce Système avec altération de la biosphère, mort de la biodiversité, dégradation du climat, épuisement des ressources, découvertes des turpitudes générées par la cupidité érigée en système, division de la société en deux groupes séparés, le peuple soumis et les oligarques dominateurs.  Le mot « réforme » passa à droite avec régressions, efforts, souci de compétitivité, abandon des droits acquis, des statuts protecteurs, asservissement de la science et de la technique aux lois du Marché, au service des entreprises privées, du seul profit.
L’illusion est dissipée et le Système naufrage la société.
Mais le Système est plastique et, comme lors de la grande crise des années 1930, promeut un leurre pour abuser les peuples : le populisme joue de nos jours le rôle que joua le fascisme dans le passé.
Loin de remédier aux tares du Système, ces leurres servent le mercantilisme, les affaires, le Marché, les firmes privées, le profit.
Prenons l’exemple du Trumpisme états-unien. Il s’est construit à coup d’éructations, de grossièretés, d’invectives très peuple contre la distinction, l’élégance, le raffinement du monde convenable des affaires représenté par Mme Clinton. En fait, le milliardaire Trump parlait « peuple » pour servir les intérêts de sa caste en habillant sa politique d’un style vulgaire, bête, primaire pour faire « proche des vraies gens ».
Or, le phénomène affecte l’ensemble des pays, de l’Amérique du Sud, à l’Europe et des réflexes populistes portent au pouvoir des forces ringardes, aigres, s’adressant au cerveau reptilien des hommes au lieu de les élever.
La presse évoque très légèrement des partis anti-Système.
Les populistes ne sont pas plus anti-Système que les fascismes d’antan étaient anti-capitalistes.
Il ne suffit pas de proférer des insanités pour être ami du peuple et travailler à la sortie d’un Système létal pour le vivant.
Les populistes ne remettront nullement en question la prévalence du commerce, de l’économie, du productivisme, des affaires. Ils sont aux antipodes de l’issue de secours qui consiste à placer la vie et le vivant avant l’argent, le social et l’écologie avant le profit et à séparer radicalement le monde politique et celui des affaires qui, pour l’heure, ne font qu’un.
Le populisme : c’est la loi du Marché plus celle des chasseurs et autres bas du front.
Est-ce pour cela que le leader de la nouvelle droite française, actuellement au pouvoir, confie la ruralité aux chasseurs ?
Le « macronisme » synthétise parfaitement les deux visages du Système : le cosmopolitisme de l’argent pour les affaires et le populisme éructant pour les moins avertis, les moins développés, ceux qui croient que le peuple confine à la bêtise.
Cette droite thatchérienne parle anglais et start up en ville, vénerie chez les ploucs.
Bref, l’Histoire balbutie et les peuples se préparent bien des déconvenues.
Etre antisystème consiste à changer les règles du jeu en unissant la liberté et la justice sociale, les impératifs écologiques et la constitution d’une nouvelle élite fondée sur le mérite, l’utilité commune, alors que l’oligarchie actuelle est spéculative, mafieuse, nocive et incestueuse avec la classe politique qu’elle finance.

Gérard CHAROLLOIS